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ET DES SIRES DE BEAUJEU. 553 dans le rapide accroissement de la puissance de ces seigneurs, qui, en moins de deux siècles et par la seule force d'une volonté persévérante, parvinrent à se créer un fief important, au dé- triment de trois provinces voisines, le Lyonnais, le Maçonnais, et l'Autunois. Peu de familles féodales offrent le même esprit de suite. D'abord resserrée dans un pays âpre et monta- gneux, du côté de Beaujeu, dans le diocèse de Mâcon, on la voit gagner peu à peu du terrain dans le Lyonnais, où elle fonda Villefranche, sa seconde capitale ; puis, forcée de s'arrêter de ce côté de la Saône, aux terres de l'Eglise de Lyon, se jeter de l'autre côté sur le pays de Dombes et la Bresse, livrés alors à une véritable anarchie, par suite de l'éloignement de l'empe- reur à qui ressortissait féodalement ce territoire. Enfin, au XIIe siècle, nous voyons le Beaujolais figurer au nombre des grands fiefs de la couronne. Trompés par ces circonstances, les historiens anciens du Beaujolais ne se sont pas contentés d'attribuer à la maison de Beaujeu une antiquité apocryphe : ils lui ont donné une extraction qui ne l'est pas moins. Les uns la font descendre des comtes de Flandres, les autres des comtes de Lyon. Tous invoquent à l'appui de leur système la similitude des armes de ces trois maisons, qui portaient d'or au lion de sables armé de gueules. Mais cette preuve, précisément à cause de sa généralité, ne prouve rien ; car elle démontrerait en même temps la parenté des maisons de Flandres et de Lyon entre elles et avec toutes celles portant le lion dans leur écu, ce qui serait d'autant plus absurde que ces maisons existaient longtemps avant l'invention des armoiries. Si le lion fut plus tard adopté par elles, c'est que cet animal est l'emblème de la force et de la générosité, et que, pour cette rai- son, il fut adopté par beaucoup de familles lorsque l'usage des armoiries se répandit, au XIIe siècle. On a aussi tiré argument de la brisure que portaient les armes delà maison de Beaujeu (un lambel de cinq pendants) pour induire sa descendance, soit des comtes de Flandres, soit des comtes de Lyon : mais nous ferons remarquer que l'emploi de ce signe comme marque distinctive des branches cadettes ne date que du XIIIe siècle ;