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384 DE LA MENNA1S. cet homme et son inflexible nature, et penseront pouvoir attri- buer ses désertions successives d'une vérité d'abord si généreuse- ment professée, aux mystérieuses réactions d'un orgueil insatia- ble ou froissé. Sans doute, la vie de cet homme peut prêter à semblable reproche ; et il y a, à la cuirasse philosophique dont il se couvre, des défauts qui permettraient à un adversaire habile et bien renseigné de lui porter un tel coup jusqu'au cœur. Mais qui donc pourrait à coup sûr pénétrer le cœur de l'homme, quand l'homme est souvent à lui-même un abîme si inson- dable ? L'orgueil qui n'est point prouvé par un fait ou par un aveu est comme s'il n'était pas ; c'est un mot sonore que l'on doit rejeter, comme on proscrit les injures de toute po- lémique vraiment raisonnable. A Dieu seul de sonder les cœurs et les reins ; aux hommes de respecter l'inviolabilité de la conscience, et de supposer toujours dans un adversaire la loyauté d'une bonne foi relative, qui excuse, au moins, si elle ne justifie pas celui qui erre. D'autres enfin, s'adressant exclusivement aux idées religieu- ses pour s'expliquer ces désordres intellectuels, considéreront ces changements successifs comme de successives punitions de l'abandon de la vérité chrétienne catholique qui l'avait, d'abord, armé son chevalier avec une si absolue confiance. Ce sera, à leurs yeux, la déchéance après la félonie : félonie et déchéance qui les autoriseront à accomplir eux-mêmes la suprême dégradation.Mais, sans contester l'auguste autorité de jugement et même de juri- diction pénale de notre foi sur les esprits, il est néanmoins per- mis de faire remarquer que cette autorité , essentiellement spirituelle, n'a da puissance que sur les esprits de bonne volonté, et que ses décisions ne sont qu'une lettre morte con- tre ceux qui se cantonnent tristement dans le simple ordre na- turel et refusent à leurs ailes les horizons supérieurs de l'ordre surnaturel et divin. Sans doute c'est à l'abandon par lui de l'église catholique, que doivent être attribuées toutes les opinions graduellement descendantes de cet homme éminent ; car toutes les vérités s'en- gendrent, se touchent et se résument en une seule qui est Dieu