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546 UNE PROMENADE EN SUISSE la nature, retombe en tourbillons écumauls dans un bassin aux noirs reflets, puis enfin se précipite éperdue dans XAar, où elle mêle ses flots écumanls et déchaînés aux eaux paisi- bles de cette modeste rivière qui s'en va calme et tranquille embellissant et fécondant les rives aimables au milieu des- quelles elle coule sans tumulte et sans bruit. Dans la riche vallée qu'elle arrose s'élève la petite ville de Meyringen ; nous y arrivons faisant sur nos montures re- trouvées une véritable entrée triomphale; car ici, au milieu de cet étroit vallon , où la nature ne nous écrase plus sous le poids de ses merveilles, nous recouvrons le sentiment de no- tre importance... et cependant, bien au loin, resplendissait encore la tête sublime des glaciers, et sur le versant de la montagne, à travers les trouées du feuillage, brillaient les reflets argentés du Reichenbaeh , comme on entrevoit l'éclair dans lesflancsdéchirés du nuage que le vent emporte sur ses ailes. Le lendemain matin, il nous faut escalader le Brùnig, petite ascension de trois à quatre mille pieds—une bagatelle, comme vous voyez ; — aussi mon digne ami me propose-t-il de faire pédestrement cette légère course dont il me garantit les salutaires effets... Espérons qu'un jour il me sera permis de les constater ; mais, pour le moment, je n'eus guère à m'en louer ; et traînant la jambe, baissant la tête, fermant le bec (chose grave!), maudissant les promenades hygiéni- ques et les jarrets intrépides démon ami, j'arrivai, tant bien que mal et plutôt mal que bien à la fin de celte course au clocher à travers les troncs amoncelés, les pierres roulantes, et des sentiers fort semblables à une échelle de meunier ; vous devez comprendre, ma chère mère, avec quel ravissement je saluai le vert plateau qui s'élalait devant nous, et combien vite j'acceptai le verre d'eau de noyau que nous offrit, sur le seuil d'un chalet riant, une jeune et blonde fille, la seule