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            TABLEAU DE LA LITTÉRATURE DU NORD.              309

et des cadences mollement enlacées, des images gracieuses
et éphémères qui nous frappent d'un éclat passager : ce sont
des élans religieux, des préceptes de vertu et de morale , de
sages et austères réflexions sur l'iuslabililé des choses humai-
nes , et l'utile emploi de nos jours. Enfin , quand , embou-
chant la trompette guerrière , ils s'élancent dans le domaine
de l'histoire , ou plutôt dans celui de l'imagination , pour
célébrer la gloire des héros , les luttes , les exploits , les
conquêtes, les vengeances éclatantes ou le triomphe sublime
du patriotisme et de la foi, le cercle de leur poésie s'enrichit
els'élève, et leurs allégories embrassent toute la nature (1). »
C'est cet effort héroïque du génie septentrional qui a donné
naissance à la grande épopée des Niebelungen , dont Henri
d'Ofterding est peut-être l'auteur anonyme , à ce chef-
d'Å“uvre qui retrace les exploits de ces fils des brouillards ,
de ces princes burgondes , héros moitié fabuleux , moitié
réels, au milieu desquels on retrouve le mythe de Sigurd ou
Sigfrid , héros traditionnel de l'Edda Scandinave, en même
temps qu'apparaît indécise, au milieu des nuages poétiques,
la figure du terrible Attila. Le poème des Niebelungen ,
plein de verve et de sens dans sa naïve rudesse, est nommé
avec raison par M. Eichhoff l'Iliade allemande , au même
degré que le poème de Gudrune peut se comparer à l'O-
dyssée. Nous aimons cette impartialité et cette vue généreuse
d'un professeur nourri des beautés fortes et simples de l'école
homérique , mais appréciant toute vraie poésie , alors même
qu'elle revêt les formes un peu rudes, la grandeur un peu
sauvage des scènes tragiques amenées par la mort de Sigfrid.
C'est le propre des esprits étendus et pénétrants qui ne sont
pas glacés par une étroile scholastique , ni par un système
préconçu, de sentir et de faire voir que le génie est frère de


  (1) Ch. XXII , p. 262.