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ET Ali LAC, MAJEUR. Ô43 une idée de la majestueuse tristesse et de la sublime horreur de ces lieux. Sûrs de l'instinct de nos chevaux, nous les lais- sions poser les pieds sur le bord d'affreux précipices béants sous nos pas ; se couler, pour ainsi dire, entre des passages si étroits que l'oeil pouvait à peine en découvrir l'issue; puis se suspendre, comme des chèvres, aux sentiers les plus es- carpés el les plus glissanls. Qu'importaient les périls ! notre attention, notre esprit n'étaient point à ces dangers ; ils étaient à ces masses profondes, infinies où notre regard se fatiguail à suivre les capricieux contours de colonnades sans nombre;... ils étaient à ces roches énormes détachées du haut des monls el qui après avoir, dans leur course furieuse, fracassé des troncs séculaires, ouvert de larges clairières, se "sont tout à coup arrêtées contre quelques brins de mousse ; ils étaient à cette verdure tendre et pâle où s'étalait, dans sa brillante variété, toute la Flore des Alpes ; ils étaient à ce sapin, roi de la forêt, tombé de vieillesse, dont le cadavre couvrait cent pieds, tandis qu'autour de lui reverdissaient de jeunes el vigoureux rejetons;... ils étaient, enfin, à ce tor- rent dont les flols se précipitaient furieux et semblaient suivre nos pas pour les arrêter ; mugissant, il creuse sur notre roule vingt abîmes que nous franchissons sur les ais mal joints de ponts ruisselant sous l'écume dont il les inonde, tremblant aux coups redoublés de son tonnerre. C'est ainsi que nous arrivons à Rosenlaûi, hameau caché dans une échancrure des Alpes donl les sommets suspendus sur sa tête l'enserrent d'une muraille infranchissable, el lui mesurent, à regret, quelques heures d'un pâle soleil. Deux ou trois maisons composent ce petit village, dont le nom gracieux [Fleur des Alpes) fait un singulier contraste avec la morne et silencieuse Irislesse de ces lieux ; huile pour les voyageurs qui montent ou descendent la Grande Schedeck, Rosenlaûi voit aussi couler, dans ses humbles murs, une