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456               USE PROMENADE EN SUISSE

nos cœurs; sauf à trouver nos yeux aveugles, notre esprit
dérangé, et nos cœurs plus arides que les mornes collines de
Valle-Benoîte.
    Le 18juillet, à six heures du soir, nous partions, laissant
 après nous pères, mères, amis stupéfaits, doutant s'ils n'é-
 taient pas le Jouet d'un rêve; nous-mêmes, à peine pouvions-
nous prendre notre départ au sérieux , tant il était prompt,
inattendu , invraisemblable. C'est ainsi qu'il faut courir le
monde ; ne me parlez point de ces voyages préparés de longue
main , combinés à l'avance et dont on a déjà défloré tout le
 charme, épuisé toutes les illusions ; trois jours nous séparaient
à peine du moment où nous avions annoncé notre résolution,
et voilà que nous roulons sur la roule de Genève, emportés
par quatre Bucéphales dont le galop , comme celui de Rossi-
nante , mérite les honneurs de l'histoire.
    Après vingt heures de réclusion dans le coupé d'une dili-
gence où, par un incroyable tour de force, nous avions fourré
quatre personnes, parmi lesquelles on comptait J.. le mince
et C. le fluet ; après quelques incidents de douanes et autres
petites misères, nous arrivons à Genève, mais tellement
moulus et brisés, les yeux si pleins de poussière et l'estomac
si vide, qu'il nous esl impossible de rien voir, sinon l'enseigne
de la Couronne, où nous allons chercher le vivre el le cou-
vert.
    Je ne m'arrêterai pas à décrire en détail la ville et les fau-
bourgs, les promenades, les boutiques el les maisons; mais
voici le lac aux flots d'azur ; de cet îlot coquet, corbeille de
verdure et de fleurs, s'élève la statue du philosophe des Con-
fessions , assis en face de ces eaux , image vivante de son es-
prit , tantôt calmes el riantes, tantôt bouleversées parla fem
pèle dans leurs plus intimes profondeurs. De ces ponts jeté s
sur le Rhône, se déroule un admirable lableau ; devant nous,
le Léman se perd à travers deux chaînes de montagnes; a