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DE LA POSSESSION ANNALE. 183 chenue, oiseau dans l'air, poisson dans l'eau, bête au buisson, cloche qui roule, onde qui coule (1). » « L'autorité des seigneurs, dit Salvaing de Boissieu (2), était si absolue et si dure, qu'ils disposaient à volonté de l'hérédité de leurs justiciables, soit que ceux-ci eussent fait testament ou non. « Les anciens chartujaires des Eglises nous apprennent aussi, ajoute Salvaing de Boissieu, que les seigneurs s'étaient appro- priés les choses saintes et sacrées comme les Eglises et les cime- tières dont ils disposaient comme de leurs patrimoines. » Tout ceci était une véritable spoliation que l'on ne vit se pro- duire qu'au milieu du règne de l'anarchie. Mais, lorsque la féo- dalité fut constituée, c'est-à -dire au Xe siècle, lorsque furent créés le Conseil du seigneur et la Cour seigneuriale se compo- sant de la réunion des vassaux, les seigneurs crurent pouvoir s'attribuer féodalement la succession des personnes qui décédaient sans laisser de disposition testamentaire. « Cet abus, dit Du- cange (3), s'enracina si fort avec le temps, que l'eschioitte, au profit des seigneurs, des biens de ceux qui mouraient intestats, passa pour un droit seigneurial. » Ce droit est ainsi énoncé dans Regiam majestatem, lib. 2, cap. 53 : Eurn guis intesto,tus decedit omnia catella domini sui sunt. Il en est aussi parlé dans beaucoup de monuments. Les seigneurs vendaient même ce droit, comme on le voit par une Charte de Roger, comte de Foix, de l'an 1250. « Il paraît toutefois, dit Perreciot (4), que l'usage le plus or- dinaire limitait ces expressions intestats, déconfès, à celui qui était mort sans avoir reçu le sacrement de pénitence : habitatur olim pro damnato et infami. « On ne distinguait pas si un accident imprévu lui avait ôté la vie ou si une longue maladie lui avait laissé le temps d'appeler (1) Voir Michelet. Origine du droit romain, Introduction, p. xui. (2) Usage des fiefs, t. n, p. 289. (3) Voir Glossaire V" Inleslatio. (4) Pc l'état civil des personnes, t. H, p. 69.