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                       ET SON Å’UVRE                         453

toires, à la rare culture de son esprit, en digne ami et émule
des Amyot et des Estienne. Le spectacle fut vraiment
incomparable de cette réception royale, et rien ne saurait
donner une idée du luxe et de la richesse qu'en cette
circonstance les Vénitiens se plurent à déployer : les gou-
doles magnifiquement pavoisées, chargées de sénateurs, de
 musiciens, de dames dont les costumes étincelaient de
 pierreries; la flotte de Saint-Marc toute entière sous les
 armes. Les vivats et les feux de salve étaient si bruyants qu'il
 semblait que la ville allait s'effondrer. Le roi logea au palais
 Foscari, sur le grand canal. Véronèse et le Tintoret repro-
 duisirent eux-mêmes la splendeur de ces inoubliables scènes.
 Le Titien, alors très âgé, reçut la visite du roi de France.
 Celui-ci, néanmoins, qui, tout Valois qu'il fût, avait du
 sang de Médicis dans les veines, tenait en si grande défiance
 la cuisine et les sauces italiennes que, pendant tout son
  séjour à Venise, il n'absorba que les mets pour lui prépa-
 rés par ses officiers de bouche. Henri resta à Venise dix-
  sept jours, pendant lesquels il visita — surtout la nuit, —
  tous les quartiers de la ville, acheta des parfums, des bijoux,
  entre autres un collier de vingt-six mille écus et un sceptre
  d'or enrichi de diamants.
   Le 27 juillet, le roi de France, accompagné des ducs de
 Savoie, d'Angoulême, de Ferrare et de Nevers quitta
 Venise. Il arrivait le soir même à Padoue et en repartait le
 lendemain pour aller coucher à Rovigo. A Ferrare, où il
 arrive le jour suivant, Henri III échange de courtois com-
 pliments avec Lucrezia et Eléonora d'Esté. Il assiste avec
 admiration à un spectacle organisé par le duc : un château
 de bois couvert de toiles peintes, assiégé par des chevaliers
 errants et qui prenait feu tout à coup, représentation qui
 coûta du reste, par suite d'un accident, la vie à plusieurs