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LES SIRES DE BEAUJEU 223 s'en remettait entièrement à la décision de celui-ci, et promit de se soumettre à son jugement. Quel plus bel hommage rendu par un sujet à son prince, que de s'en remettre à son jugement après l'avoir offensé ! Et ces princes étaient dignes de cette confiance. Ecoutez ce passage du testament d'un des successeurs de Guichard, Antoine, et voyez en quels termes émus il parle de ses vassaux et avec quel souci de leurs intérêts : « Considérant les grands services que ses sujets de Beaujolais lui avaient rendus gratuitement et en diverses manières, et étant juste et raisonnable de les en récompenser, d'autant plus qu'il espérait qu'ils seraient bons et fidèles serviteurs de ses successeurs; voulant que sa noblesse et toute sa terre fût plutôt enrichie par l'accroissement et la multitude de bons hommes et vassaux, que par les trésors d'argent qu'il en pourrait retirer,suivant le proverbe qui dit qu'il vaut mieux avoir un ami sur la place, que d'avoir de l'argent dans ses coffres ; étant injuste que les travaux de ses sujets rappor- tent du profit à d'autres qu'à eux ; c'est pourquoi il lègue à tous ses hommes et sujets, et à chacun d'eux, les droits de nouvelle reconnoissance qu'ils pourront devoir, de droit ou de coutume, à son héritier après sa mort, pour les biens qu'ils tiennent de lui, voulant que son héritier ne puisse exiger d'eux que les biens et servis ordinaires, léguant à chacun de ses sujets les autres droits qu'ils pourraient lui devoir (9). » (9) Un fait, rapporté dans une enquête de 1426, fait voir avec quelle rigueur ce même prince réprimait les violences commises par les seigneurs contre ses sujets. Un de ses meuniers ayant été battu par le seigneur de Beseneins, Antoine fit mettre ce dernier dans les prisons de Thoissey, et ordonna qu'il paierait une grosse amende au meunier