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ET SON ŒUVRE 373 voulant en surveiller lui-même l'impression (18), part pour Venise en passant par Ferrare et Padoue. Il y arrive en janvier 1508. C'est l'époque où Venise est au zénith de sa gloire artis- tique et littéraire, l'époque des Bellini, Cima, Carpaccio, Giorgione, Palma et Titien. La société de cette ville arrive au développement complet de la vie de l'esprit, grâce à sa fréquentation avec la Grèce et l'Orient. La célébrité euro- péenne d'Aide Manuce, le grand imprimeur helléniste, contribue encore à faire de la capitale de la sérénissime République, le centre distingué des Lettres. Tout près du Rialto s'élève la maison d'Aide. C'est là , qu'en compagnie de son beau-père André d'Asola et de ses beaux-frères François et Frédéric, Aide travaille à ses immortelles publi- cations. Erasme fit chez celui-ci, devenu très vite son ami, un séjour charmant. On y causait en grec pendant les repas. Malheureusement la chère n'y était guère bonne. Erasme, habitué à la sustentation abondante des gens du nord, en souffrit et finit par prendre ses repas à part. Il faut lire dans ses Colloques (19) les spirituelles critiques d'Erasme sur les repas de son hôte dont la frugalité, habituelle aux Italiens, le stupéfie. Ecartons en passant les assertions venimeuses de Scaliger, un de ses ennemis (20), contre l'intempérance d'Erasme. Celui-ci y répondit par ses récits : Opulentia sordida, dont le ton méchant est excusé par la violence des attaques du philologue italien. Tout en préparant sa seconde édition des Adages, Erasme (18) Cf. La remarquable Vie d'Erasme, par Rhenanus. (19) Traduction. Develay, t. III, p. 215. (20J Cf. Scaligeri J.-C. Oratio contra Ciceronianum Erasmi (Heidel- berg, 1618).