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 466                   JEAN BONNASSIEUX

laglaise, puis abandonné au praticien; le marbre vient dans
l'atelier du maître et y reste des mois; il le travaille, le
retouche; les accessoires ne détournent pas l'attention que
captive cette admirable tête; et cependant ils sont si bien
traités qu'un coin de draperie blanche retombant sur le
socle de granit gris semble un linge véritable oublié par
l'artiste (10). »
   Bonnassieux a sculpté pour le Forez une de ses dernières
œuvres, la statue en bronze de Victor de Laprade, inaugurée
à Montbrison le 17 juin 1888. Le poète est représenté
debout et légèrement appuyé sur un cippe; l'artiste a fran-
chement accepté, sans le moindre artifice de draperie
flottante, les difficultés du costume moderne. On pourrait
faire peut-être quelques réserves sur la pose delà statue;
mais cette tête de poète inspiré, si dédaigneux des peti-
tesses qui composent la vie humaine, dont les yeux vont
chercher, bien au-delà des étroits horizons d'ici-bas, l'idéal
dont son âme avait soif, est d'une beauté sublime.
   Ce grand artiste, on peut le dire, est mort dans l'atelier
où il avait passé sa vie. Quelques semaines avant sa mort, il
travaillait encore au Saint-François d'Assise en extase, de
notre cathédrale de Saint-Jean, où il a mis toute sa foi reli-
gieuse. Cette statue à peine achevée, Bonnassieux fut
frappé d'une congestion pulmonaire ; un instant, il parut
triompher du mal, mais une seconde atteinte l'emporta en
quelques heures, le 3 juin 1892. Ses funérailles furent
célébrées le 6 juin, avec tous les honneurs dus au membre
de l'Académie des Beaux-Arts et ce qui vaut mieux, au
milieu de la douleur des vieux amis qui pleuraient un des
hommes les meilleurs qu'ils eussent jamais connu.

                                        l'abbé REURE.

  (I) Vicomte Dauger, dans les Notes d'art et d'archéologie, juin 1892.