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LES CONFESSIONS DE Mme ARTHUS 359 Elle voulut avoir mon sentiment sur M. de Regnaudy. Pour ce, je fus invité à me trouver chez sa parente, le lendemain, un peu avant l'heure où il devait faire sa visite. Malgré le portrait que Mme Arthus m'en avait tracé, je m'attendais à trouver, sur l'énoncé de ses fonctions, un personnage moitié ingénieur, moitié chef de bureau, quelque chose comme un garde national correct. Pas du eout, c'était bel et bien un superbe mâle, d'allure martiale, qu'on ne pouvait guère se figurer autrement que l'épée au côté, et je compris que la pauvre veuve se tînt en garde contre le prestige de l'uniforme. * ** Il était difficile que le secret de ces rencontres entre me M Arthus et M. de Regnaudy fût gardé bien longtemps. Lui peut-être en laissa-t-elle percer le mystère, afin de pres- ser le dénouement. Mais, avec une déconcertante obstina- tion, elle se dérobait et reculait son oui, tant et si bien que l'infortuné soupirant dut rejoindre seul son poste dans les Pyrénées et s'y installer en garçon. C'était une épreuve à laquelle la jeune femme voulait le soumettre et se soumettre elle-même, ainsi qu'elle me le confia par lettre. Mais elle avait promis, l'été venu, d'aller faire un séjour, avec ses enfants, dans une station thermale voisine de la ville où le colonel avait son service. La pro- messe fut tenue, et celui-ci, plus épris que jamais, fran- chissait deux fois par semaine, au trot de son alezan, les quatre lieues qui le séparaient de Saint-Christol-les- Bains.