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             LES CONFESSIONS DE Mm= ARTHUS                35 I

    « Car, tenez, si vous habitiez Bar-sur-Mer et qu'il vous
plût de renouveler quelquefois la visite que vous me faites
maintenant, il ne manquerait pas, malgré votre qualité
d'homme marié et la différence, qui sépare votre âge du
mien, de s'élever aussitôt des rumeurs malveillantes. »
    Je l'avais laissée parler, plaçant de loin en loin un mono-
syllabe, uniquement pour lui témoigner que je l'écoutais
avec intérêt. Pendant ce temps, notre promenade par les
sentiers en lacets nous avait amenés à la claire-voie qui
sépare le jardin du mail. Je lui offris le bras pour remonter
l'allée principale conduisant à la maison.
    « Vous êtes surpris de m'entendre, poursuit-elle afin de
m'arracher à îmon rôle quasi muet de confident. J'avais
besoin, voyez-vous, de dire tout haut ce que je pense
tout bas depuis un an et plus.
    — Et vous m'avez attendu pour cela, répondis-je, en
cherchant à le prendre sur un ton paterne. Il est, n'est-ce
pas ? des confessions qu'une femme fait plus volontiers à
un missionnaire de passage qu'à son curé.
    — Une malice à l'adresse des dames ! c'est assez votre
habitude, dit-elle, avec un sourire qui, en détendant son
visage, fait jaillir deux larmes de ses paupières gonflées.
Mais qu'allez-vous maintenant penser de moi ? »
    Ce que j'en pensais, tout le monde le devine : c'est qu'il
lui fallait chercher un second mari. J'hésitais cependant à
lâcher le mot tout de suite ; je me perdis dans des considé-
rations philosophiques sur la vie, sur les compensations
que la Providence nous réserve souvent, sur le temps qui
est un grand médecin, et le reste.
    « Non, reprend-elle, les premiers moments du veuvage
ne sont pas, comme on incline à croire, les plus pénibles.
L'acuité de la douleur et l'affolement qu'elle produit tien-