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AVEC L'ABBÉ DE BARRUEL 35 mettait Dieu à la porte de la création et supposait la terre existant de toute éternité. Il y avait entre les deux écrivains un malentendu qui s'explique d'un mot : l'un faisait de la science, et l'autre faisait de la théologie. Soulavie exposait le résultat de ses observations sur les couches terrestres et les boulever- sements du globe, et Barruel le suivait d'un œil défiant, toujours prêt à voir dans les faits exposés un démenti aux livres de Moïse et une entente souterraine avec les philo- sophes du temps acharnés contre la religion. Soulavie avait dit : « Les grandes opérations de la chimie naturelle s'offrent encore dans ces régions sous les formes les plus imposantes. Nous décrirons l'état antique du monde physique, ses dégradations, ses réparations et ses métamorphoses diverses, sans que la matière, malgré l'inertie et l'inactivité dont les scholastiques ont voulu l'envelopper, paraisse avoir resté un seul moment en repos (4). » Cette dernière phrase indigne Barruel qui s'écrie : « Ces petits tours d'adresse, ces petits traits lancés contre les scholastiques, ces promesses, surtout, si propices à nos matérialistes, vont sans doute étonner les bonnes gens. » Et ailleurs : « Que M. le Vicaire tienne sa parole, et je lui promets, moi, de démontrer ce que tant de nos sages ont si souvent dit sans le prouver, que la force qui rend nos Cartouches menteurs, fripons, voleurs, nos Desrues scé- lérats, n'est qu'un pur méchanisme, qu'ils sont fort excu- sables d'en suivre l'impulsion, et que la liberté, le bien moral, ne sont qu'une chimère. » (4) Préface du 2' volume de l'Histoire naturelle,