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322              LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON

 et ne le peuvent pas         Comment lutteraient-ils, avec
leurs minces allocations, contre les enchères ardentes ,
 affolées des amateurs millionnaires qui offrent le pesant
 d'or d'un livre qu'ils tiennent à avoir à tout prix, par pas-
 sion, par goût et même... par vanité seulement. Combien
notre ville n'a-t-elle pas perdu de la sorte de monuments
introuvables maintenant ! Qu'on parcourre les catalogues
 des nombreux cabinets vendus aux enchères depuis le
commencement de ce siècle, et on verra avec douleur que
 de livres lyonnais, que de documents lyonnais inédits, in-
connus même, sont allés s'enfouir au loin dans d'autres
cabinets et d'où ils ne reviendront plus à Lyon!!! J'aime
donc peu ces cabinets, et je ne peux qu'adjurer, au nom
de la science, leurs fortunés détenteurs à penser aussi un
peu à leur ville et au modeste savant qu'ils privent sou-
vent de ses meilleurs outils, par la claustration de leurs
sanctuaires, en laissant au moins, à leur heure dernière,
quelques bribes de leur trésor au pays qui les a vu naître.
C'est là aussi une manière de faire preuve de patriotisme.
N'est pas patriote seulement celui qui va à la frontière
donner son bras et son sang à sa patrie ; mais le riche qui
glisse une obole dans la main du pauvre, qui fonde un lit
pour lui à l'hospice, qui crée une école pour donner le
pain de l'esprit à l'enfant du peuple et qui laisse ses livres
à la Bibliothèque de sa commune, celui-là aussi fait acte
de charité chrétienne et de patriotisme. Que les détenteurs
de nos riches cabinets actuels me permettent donc de leur
tendre la main, au nom d'un pauvre presque honteux, qui
s'appelle Lyon, — et de les prier de songer à lui, quand
Dieu aura mesuré le nombre de leurs jours. Ce grand pau-
vre a le cœur plein de reconnaissance ; il écrira leur nom
sur le marbre, — et la postérité, qui n'oublie rien, leur
dira aussi merci. La générosité est une grande vertu. —