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318 LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON Boccace, Arioste, chez les modernes; et en France, Cor- neille, Racine, La Fontaine et Molière. Aujourd'hui le goût a changé ; sans exclure le moins du monde les œuvres des grands génies que je viens de nommer, les bibliophiles poursuivent, avec ardeur, les anciennes chroniques, les mystères, les romans de chevalerie, surtout les vieux poètes et les facéties. Généralement, celui qui compose un cabinet poursuit la série des ouvrages écrits par un seul homme et s'applique pendant toute sa vie à les rassembler, n'acceptant jamais que des exemplaires de choix, dans un état parfait de conservation. Ici, je vois sourire ceux de mes lecteurs qui ne comprennent rien aux innocents plaisirs de la collection, et le mot de bibliomane est sur leurs lèvres. Sans doute c'est de la bibliomanie, mais cette passion peut avoir aussi son côté utile ; grâce à la persé- vérance de certains chercheurs obstinés, toutes les édi- tions de nos meilleurs écrivains ont été poursuivies, étu- diées, comparées entre elles. Les œuvres de Villon, de Rabelais, de Corneille, de La Fontaine, de Molière sont maintenant classées avec soin et mises au nombre des livres les plus précieux. On le voit, la bibliomanie dont les gens du monde aiment tant à se moquer, peut aussi ren- dre aux lettres quelques services... » Je concède à M. Le Roux de Lincy que « les innocents plaisirs de la collection peuvent rendre aux lettres quel- ques services. » Le bibliomane, par ses incessantes re- cherches chez le bouquiniste, sur les ponts et sur les quais, même chez l'épicier ou dans les greniers poudreux des vieilles maisons, peut sauver de la destruction des ouvra- ges précieux par leur rareté (1) ou par leur curiosité. — (1) Il est une manie contre laquelle on ne saurait non plus protcs-