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                      LE SALON DE 4875.                   135
    Mais la peinture de genre est beaucoup plus en honneur que
 sa sœur ainée. Rien de plus naturel ! Dans un siècle où les
 découvertes scientifiques et les questions politiques et
 commerciales absorbent la plupart des esprits cultivés, dans
 un pays où les grands événements semblent ne laisser
aucun vestige et où les idées bourgeoises font la loi, faut-il
 s'étonner de cette tendance? Pour qui l'artiste épuiserait-il
les efforts de son génie, si le public ne doit pas y corres-
pondre? L'art ne vit pas isolé : il a besoin d'être soutenu
et encouragé. Ne blâmons donc pas l'artiste de préférer aux
longs et pénibles labeurs que demandent les grandes toiles,
les sujets domestiques et familiers qui lui rapportent
honneur et profit et que le riche bourgeois, qui les comprend
mieux, peut placer avec orgueil dans son salon de propor-
tions restreintes. Quant à nous, nous avons même une pré-
dilection pour ces scènes de caractère, qui sont % la grande
peinture ce que la haute comédie est a la tragédie, ce que
Molière est a Racine. A l'artiste le devoir de lui conserver
cette finesse d'observation et cette convenance d'allures qui
en font le plus grand charme !
    Cela dit, hâtons-nous de reprendre notre promenade a
 travers le salon.
    M. Bertrand a exposé une nudité, mais une nudité plus
chaste que beaucoup de draperies. C'est une jeune fille qui
se hisse gracieusement sur le bout des pieds pour regarder
de l'autre côté d'un mur. Que veut-elle voir ? On est pris de
sa curiosité enfantine, on oublie qu'elle n'est pas vêtue et
l'on a que la pensée du peintre : Trop petite ! Ce n'est
qu'une académie, mais elle est intelligente et spirituelle.
Cependant, en voulant la rendre plus svelte et moins char-
nelle, M. Bertrand n'a-t-il pas fait les membres un peu
grêles et les chairs un peu livides ?
   La Juive d'Oran à la fontaine, de M. Hirsch, penchée