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2C> LES BIBLIOTHÈQUES DE LYON Comme on le voit par ce rapport, le 5 fructidor de l'an II, les monastères de Lyon étaient tous séquestrés alors, et une partie même avait été déjà aliénée par la nation. Leurs bibliothèques avaient été transportées au dépôt général formé à la Maison Pierre (abbaye de Saint- Pierre), ou, gisaient entassées dans les couvents non encore vendus. Ce qui avait été transporté avant la rébellion à la Maison-Pierre, devenue pendant le siège la caserne des muscadins, avait été brûlé par les bombes, était pourri sous l'action de la pluie, ou avait été détruit par les volontaires, comme livres de fanatisme. Les volumes transportés au Petit-Collège ou dans une cave voisine avaient été non moins endommagés. Cependant on ne brûlait plus alors les livres du fana- tisme. Plus de trente mille avaient été enrayonnés et cata- logués par les ordres du citoyen Jousselme. Dans ce nombre formidable se trouvaient aussi ceux enlevés au domicile des rebelles-cagots, emprisonnés, fusillés ou guillo- tinés. La nation, généreuse et juste, avait dépouillé alors aussi les cy-devant couvents et les rebelles-cagots de tout ce qu'elle avait trouvé d'objets d'art ou de sciences dans leurs maisons ; la bombe y avait bien fait quelques dégâts, et il y avait du bon, d'après les personnes de l'art, ajoute le citoyen Jousselme. Mais quel chaos devaient présenter alors ces milliers de volumes déchirés par les bombes, endommagés par le feu ou pourris par la pluie ou l'humidité des caves où on les avait enfouis. Chez quelle nation civilisée s'est ren- contré jamais un spectacle aussi hideux et aussi navrant ! et c'est au nom de la Raison et de la Liberté qu'on com- mettait de pareils actes de vandalisme. Le malheureux et vertueux Bailly, mourant sur l'échafaud, avait bien raison