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                       BIBLIOGRAPHIE.                   471

ceux de la bataille des Egaux mangent à présent la pous-
sière !..
   « — Vraiment on, dirait que vous les avez vus, mon
brave !
   « — Une nuit je m'attardai près de la grande pierre
de César ; tout à coup un grand bruit me réveille : sortent
de terre soixante cavaliers, trente à ma droite, trente à
ma gauche... la sueur perle à mon front... Ils galopent
au son d'une trompette aigre et discordante, lançant du
feu par les naseaux, ces chevaux décharnés dont les os
craquent et les quatre fers font feu sur les cailloux... fer
contre fer, lame contre lame, les lances grincent sur les
têtes d'acier, et les soixante couraient et se lieutaient ;
chaque épée luisait comme la flamme et les morts se ran-
geaient sur la terre comme les gerbes sous le volant du
moissonneur. Cinquante-huit tombèrent, et la bataille
était égale, deux restaient, se regardant à travers les
grilles de leurs casque, l'oeil flamboyant comme tisons,
haut la lance, et criant à tue-tête : Robert ! Robert !
On dit qu'ils étaient frères ; mais tous deux dans des
camps opposés, ils criaient, galopaient. A chaque coup le
fer luisait comme la flamme, et le sang coulait dans les
sillons de blé...
   « Mais le jour allait poindre et le toit d'ardoise de la
grosse tour de Bouy blanchissait comme une montagne
dans le ciel ; les cavaliers, descendus de leurs chevaux
diaboliques, lavaient au ruisseau de Bétron le sang qui
ruisselait de leurs cuirasses. Moi, blotti contre mon
gerbier, je regardais les fantômes; le son de Y Angélus
les fit disparaître... Oh ! que je fus aise de retrouver ma
soupe qui réchauffait sur la braise de l'âtre... et notre
femme aussi ! »
   Entendez-vous dans le lointain ces sourds roulements