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ÉTUDE SUR LE PATOIS LYONNAIS. 393 E non estreeh (1) res (2), e tôt lo mon abras (3) ; Oy (4) ho de mi, e vult a altri gran bé ; Si non es amor, donch aço que sera ? Tout cela est du pur roman, s'il en fut. J'en donne la traduction en patois aussi littéralement que possible ; au lecteur de juger la distance qui les sépare: Et je n'ai gïn de pou, et gin ne chercho guerra; Je m'involo ou cier, et ne boujo de terra ; Et je n'etreigno rin, et tôt lo mond'imbrasso ; Ous otros volo bien, et, solet, me tracasso : Si o n'est de l'amour, qu'est-o donc qu'o sera ? C'est ce madrigal, du reste, qui aurait eu le privi- lège d'inspirer à Pétrarque son sonnet: S'amoi non è. Pour la rareté du fait je le transcris' ici en entier, afin de montrer tout à la fois, et les origines catalanes de la poésie italienne, et mettre en regard la gravité et la sobriété d'ex- pression espagnoles , avec la faconde et la manière italienne : S'amor non è, dunque è quel ch'i' sento ? Ma s'egli è amor, per dio, che cosa e quella ? Se buona, ond'è Veffeto aspro mortale ? Se ria, ond'è si dolce ogni tormento ? S'a mia voglia ardo, ond'è i'ipianto ël lamento ? S'a mal mio grado, il lamentar che vale ? O viva morte? o dilettoso maie ! Corne puoi tanto in me, s'io nol consento ? (2) Etreindre, serrer ; on dit encore les étreh, travail ou l'on serre les bœufs pour IPS ferrer. (3) Origine du mot rien, res, une chose quelconque, un rien. (4) Embrasser, prendre à tras-le-corps. (5) Oy, odi, je hais, j'ai haine de moi, je me veus mal. 36