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346                    DEUX ITINÉRAIRES

dions nos excellents guides avec forces remercîments et poi-
gnées de mains, sans compter les attestations chaleureuses
que nous consignons en-leur faveur sur leurs livrets. No";.s
traitons avec un voiturier pour le trajet de Ponte-Grande à
Baveno, au bord du lac Majeur. Douze fr. pour cinq lieues;
c'est honnête! Nous lui donnons un quart d'heure pour atte-
ler sa voilure et allons fumer un cigare sur le pont. Au re-
tour, devant la porte de l'auberge, nous apercevons un char
suisse démesurément long, orné de quatre ou cinq bancs.
Sur ces bancs est rangée toute une colonie de montagnards
emigrants, vitriers, plâtriers, fumistes, chocolatiers. Ils sont
la dix ou douze perchés partout, Dieu sait comme, sur le
brancard, sur le marchepied, sur tout ce qui offre une saillie
quelconque. C'est le corricolo napolitain. Disons cependant,
pour rendre hommage a la vérité, qu'on avait daigné nous
réserver une toute petite place sur le devant du véhicule.
Sommé de nous dire ce que signifie cette cargaison humaine,
l'honnête voiturier nous répond « Ce sont deux ou trois
voyageurs qui vous demandent la permission de faire route
avec vous, mes bons Messieurs; ils ne sont pas embarras-
sants , vous ne vous apercevrez pas de leur présence ! » Il
disait cela d'un air béat et chattemite.
   « Charmant! adorable! nous écrions-nous, on fait de nous
des entrepreneurs de transports gratuits! merci! nous ne
sommes ni assez nigauds ni assez grands seigneurs pour
faire voyager une tribu a nos frais! »—Et, ce disant, nous
nous élancions sur le strapontin d'un tilbury qui fait le cour-
rier pour Fogogna et qui décampe au grand trot, en laissant
ces parasites de voiture outrés de notre inconvenance. —A
Vogogna, nous les revîmes arrivant quelques minutes après
uous ; ils s'étaient probablement décidés a payer de leur po-
che, non pas sans trouver notre procédé très-égoïste et très-
indécent.