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LETTRES INÉDITES. S03 absolument la contre-partie de Justine ou les malheurs de la vertu, de M. Sade. C'est l'histoire d'un jeune homme qui, par suite d'aventures romanesques et dont on n'a guère même cherché à prouver l'invraisemblance, tombe entre les mains de plusieurs femmes qui, successivement, lui font faire des horreurs et éprouver des traitements abominables. Il com- mence par violer ses sœurs et sa mère; il tue et mange son bienfaiteur, enfin, il assassine son propre père, et tout cela malgré lui. Une femme lui mange les sur le gril; c'est son déjeuner habituel el elle a des hommes en provi- sion pour cet usage. Enfin, ce roman qui pourra former un petit volume, est, quoiqu'il n'y ait pas un mot obscène, un tissu deshorreurs les plus dégoûtantes et les plus épouvantables. Celles de Justine sont couleur de rose auprès. Malgré cela, il se fait lire d'un bout à l'autre avec avidité, il intéresse et je suis persuadé qu'il aura un grand succès. Il est écrit chaude- ment et assez purement. C'est le fruit d'une imagination dé- réglée au souverain degré, et l'on ne conçoit pas que le cerveau d'un homme ait pu enfanter de telles extravagances. S'il est imprimé, comme.il y a apparence, car l'auteur cherche un libraire qui veuille en traiter, vous en entendrez parler indubitablement. Il faut que je vous raconte, en finissant, un vol tenté der- nièrement dans la rueSaint-flonoré. Le voici tel qu'un homme me le racontait dernièrement, derrière moi, au théâtre de la rue Faydeau'. Des voleurs de nuit, tentant de forcer une bou- tique, ne pouvant crocheter.la serrure ou plutôt le verrou, ont fait un trou dans la porte, l'un d'eux passe la main pour tirer le verrou ; mais il avait compté sans son hôte. Un garçon, couché dans la boutique, le laissa faire, el lorsque la main fut passée, il la coupa d'un coup de sabre el le lendemain alla la déposer chez le juge-de-paix, d'où le voleur n'a pas été tenté d'aller la retirer. Un des auditeurs observa judicieusement que