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                        LES CROISà&JÎS.                    139

Des masses de combattants ne peuvent se heurter sur les
champs de bataille, sans qu'il n'en résulte une infinité de
victimes et des flots de sang répandu. Les hostilités ne peu-
vent se prolonger longtemps sans qu'elles n'entraînent la
ruine de beaucoup de fortunes particulières et souvent celle
des Etats. Cela prouve simplement que la justice pour les
peuples est coûteuse, que la guerre est un formidable tribu-
nal établi entre les nations, que les gouvernements ne doivent
y recourir que dans l'extrême nécessité. Mais, il n'y a rien
dans tous ces maux, qui rende les Croisades particulière-
ment odieuses, et qui prouve que les souverains et les peu-
ples du moyen âge aient manqué de sens en les entreprenant.
Quand M. Viennet taxe de pieuse folie nos expéditions
saintes, parce qu'elles ont laissé derrière elles la dépopu-
lation, l'anarchie ; parce qu'elles ont consommé des géné-
rations entières ; parce qu'elles ont été, parfois, conduites
sans discipline , sans prévoyance , etc., M. Viennet fait
tout simplement du lieu commun et de la déclamation ; il
montre qu'il n'a point sérieusement remué l'époque où se
sont accomplies les Croisades, qu'il ne s'est rendu compte
ni de l'esprit qui animait nos pères, ni du mobile qui les fai-
sait agir, ni de la trace profonde que leurs pas ont laissée
dans le sol de l'Europe et de l'Asie.
   Les Croisades, une pieuse folie!... Certes, une pareille
qualification pouvait être accueillie avec faveur, il y a cent
ans, lorsque, grâce à une ignorance dédaigneuse du moyen
âge, on n'y voyait que fanatisme, barbarie, dévotion ridicule;
lorsque Voltaire, et, à son exemple, les encyclopédistes
couvraient de leurs risées le zèle des chevaliers pour la déli-
vrance d'un tombeau, leur ardeur a aller attaquer des peu-
ples qui, disait-on, ne leur demandaient rien; lorsque grands
et petits sophistes mesuraient les œuvres de nos pères aux
mesquines idées de leur philosophisme anti-chrétien; lorsque