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204 BIOGRAPHIE POPULAIRE
Le patient seul, tenu par le nez avec une vigueur plus démo-
cratique que réfléchie, demeurait immobile et calme.—Oh ! s'é-
cria tout à coup, en serrant plus fort l'appendice charnu de la
victime et en brandissant son rasoir, le Figaro exaspéré : oh ! si
je tenais le Castellane comme je tiens ce citoyen ! quel bonheur
j'aurais à lui couper la gorge !
Le propos vint aux oreilles de Castellane.
Le lendemain matin, il descendait de cheval devant la boutique
de son féroce ennemi ; et, laissant à la porte son escorte, venait
s'asseoir sur le fauteuil où devait avoir lieu son supplice.
Le barbier se confond en salutations respectueuses, en gra-
cieux sourires; court à droite et à gauche, jette dans le plat Ã
barbe de la poudre de riz au lieu de poudre de savon ; y plonge
une brosse pour une savonnette, repasse sur le cuir un peigne
au,lieu de rasoir et, perdant enfin complètement la tête, appelle
à grands cris sa femme à son secours.
Celle-ci parvient à .réunir les objets nécessaires et, passant
elle-même la savonnette sous le menton du général, met un ra-
soir dans la main de son mari.
Le perruquier s'approche ; mais il est tellement ému qu'il lui
est impossible de remplir son office.
— Eh bien! lui dit Castellane, coupe-moi donc la gorge
maintenant !
A ces mots le piteux Figaro se croit perdu. Castellane se lève
tranquillement, et après avoir essuyé son menton, il met une
pièce de cinq francs dans la main du pauvre diable et sort en lvi
disant :
— A l'avenir, mon ami, rasez en paix et ne coupez plus !
Castellane, étant colonel, faisait, dans un café, une partie
d'échecs avec un des officiers de son régiment. Les deux adver-
saires étaient absorbés dans leurs combinaisons -, il s'agissait d'un
coup décisif. A un instant donné, l'officier fait une faute :
— Capitaine, lui dit son colonel, vous êtes échec et mat. En
outre, comme il est midi et que vous vous trouvez en petite
tenue, rendez-vous aux arrêts !
Il lui arrivait souvent, lorsqu'il commandait à Perpignan, de