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DU MARÉCHAL CASTELLANE. 199 endroits voulus, un galop particulier, dont le mécanisme restera toujours à expliquer. Sur ce petit cheval, Castellane est rivé par des moyens tout aussi mystérieux. Il a les jambes très-longues, le buste très-court, le dos forte- ment voûté. Sa figure pâle, dont la vieillesse a exagéré les traits saillants, est enchâssée dans les larges broderies d'un collet un peu suranné. Cette tête fine et ronde attirerait peut-être moins l'attention sous les ruches d'un bonnet de douairière*, abstraction faite d'une petite moustache en brosse, à peine apparente. En ce moment Castellane marche au pas. Il traverse la voie que les gendarmes et les factionnaires tiennent à grande peine ouverte, au milieu de la foule impatiente, pour laisser libre-au Maréchal l'accès de cette place privilégiée qui, presque tous les dimanches, voit se renouveler le même spectacle, aux yeux du même public, toujours enthousiaste de ce même plaisir., Les troupes réunies à Bellecour offrent, en miniature, le spécimen d'une armée prête à entrer en campagne. Toutes les armes s'y trouvent combinées : infanterie, cavalerie, artillerie, génie, train, services administratifs, représentées par un détachement complet de chacune d'elles. L'arrangement de ces troupes pour la parade est invariable : c'est une science particulière à l'armée de Lyon et que tous les généraux et les officiers d'état-major sont tenus de posséder à fond, sous peine de défaveur. Le Maréchal, arrivant par la rue Bourbon, pénètre sur la place- en suivant l'axe de la chaussée en asphalte qui prolonge cette rue. Au-delà des jardins il tourne à gauche et se trouve alors devant la -droite de la ligne d'infanterie, développée sur les quatre dimensions de Bellecour, à l'intérieur des banquettes et face à la statue de Louis XIV. Là il prend son petit galop et parcourt, avec son cortège, le front de la ligne de bataille. Le tour fini, il passe en revue l'artillerie rangée devant l'Hôtel de la Poste-, puis la cavalerie, sur la place de la Charité ; et enfin les pontonniers, devant l'église du même nom.