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112 LES CROISADES. tels excès et surtout en empêcher le retour. Si alors, les au- tres gouvernements de l'Europe, oubliant les mesquines défiances d'une politique jalouse, se fussent joints au gou- vernement de l'Empereur ; si non plus six mille, mais soixante mille hommes, franchissant les mers eussent arrache aux stupides disciples de Mahomet, une terre autrefois si glorieusement conquise par nos pères, et aujourd'hui si cruellement arrosée par le sang de leurs enfants, qui de nous aurait traité cette entreprise de folie? N'aurions- nous pas vu au contraire, dans cette moderne Croisade, la solution d'une partie de cette question d'Orient qui fait blanchir les cheveux de la diplomatie? Mais la cause de cet ébranlement guerrier qui jeta, au moyen âge, l'Europe sur l'Asie , quelle est-elle , sinon cette même question d'Orient? Il ne faut pas se le dissimuler, la question d'Orient n'est pas d'aujourd'hui, elle est de tous les siècles ; et l'on peut dire que toutes les générations l'ont vue sous des formes diverses se dresser devant elles, quelquefois résolue, jamais anéantie, et, comme le phénix, renaissant de ses cendres. Chose étrange ! Cet Orient où naît la lumière, où se sont passées les premières scènes de la vie humaine, d'où l'homme est parti pour conquérir le monde, a été per- pétuellement, pour l'Occident, un sujet ou de cramle ou d'espérance. C'est de là que sont sorties la civilisation et la barbarie. Si nous nous reportons à l'époque où Rome, arrivée au plus haut point de sa grandeur, après avoir absorbé l'uni- vers, paraissait ne devoir plus craindre que-ses propres divisions, nous trouvons que l'Orient inquiétait déjà son oreille et venait troubler la sécurité de sa puissance. Ecou- tons Suétone : « Percrebuerat Oriente loto vêtus et constans opinio, esse in fatis, ut eo tempore, Judeâ profecti rerum