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— 474 — gnée ; à ceux qui ne prescrivoient que des rafraichissans dans les fièvres et les inflammations, une foule de malades guéris par des médecins qui n'ordonnoient que les aromatiques et les amers ; aux partisans des pur- gatifs donnés tous les deux jours, je leur désignai plusieurs centuries de fièvres sinoches et putrides guéries sans un seul purgatif. « La question présentée sous ce point de vue, tous furent contraints d'avouer que, dans tous les cas où on n'avoit pas suivi leur doctrine, la nature avoit eu assez d'énergie pour guérir la maladie et pour surmonter les mauvais effets des remèdes mal administrés. D'où je conclus dès lors que, puisque le principe vital, la réaction spontanée des organes irrités ou la nature avoit eu assez de ressources pour guérir malgré les empêche- mens causés par les remèdes contraires au mal, elle sauroit bien guérir des maladies qui lui seroient absolument abandonnées... ». Nous avons tenu à citer en entier le passage, tant il est savoureux, tant il reste actuel, et tant il montre de bon sens dans l'esprit de Gilibert. « Si on me demande, poursuivait-il, pourquoi une si grande vérité est si peu répandue, pourquoi les médecins ne l'annoncent presque jamais ni en public, ni en particulier, j'oserai dire parce que leur amour-propre et leur intérêt leur ont fait illusion ; il est si agréable pour le premier et si utile pour le second de croire et de faire croire qu'on a guéri, qu'on par- vient enfin à se le persuader ; on s'imagine que si les hommes savoient ce terrible secret que lanature seule les guérit, ils auraient moins de confiance aux médecins ». De cet esprit critique témoignait déjà mainte page de l'Anarchie médicinale, notamment dans les chapitres intitulés : la Constitution des Universités est une des causes de l'ignorance des Médecins, les Profes-. seurs des Universités de Médecine sont une des causes de l'ignorance des Médecins..., etc. Lui, au contraire, donnait des preuves de méthode et de bon sens, lorsque, à l'Hôpital de Grodno, il entreprenait d'observer quelles maladies sont capables de guérir spontanément, et, pour les autres, quels remèdes sont vraiment efficaces. Il explique ainsi comment il procédait : « La pharmacie du Roi étoit sous ma direction, le pharmacien sous mes ordres, tous les officiers de l'hôpital dépendoient de moi ; je pouvois sans