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l'approche des grands cataclysmes politiques qui vont détruire l'organisme
social, même mépris du danger, même raffinement d'existence. Les Bur-
gondes sont maîtres de Lyon, les Huns, les Vandales, les Suèves, les Wisi-
goths envahissent et saccagent toutes les provinces gauloises, l'empire
romain change de César presque chaque année et, malgré tant de sujets
de tristesse, Sidoine fait le panégyrique des empereurs, rime des vers,
écrit des lettres destinées à être publiées, et, lorsque contraint d'abandon-
ner sa femme et les siens, il devient évêque de Clermont, sa parole et sa
plume font de lui le premier des prélats de l'époque.
      La lettre que nous allons étudier, comme toutes celles qui nous sont
parvenues de ces siècles reculés, ne porte aucune date. Toutefois on peut
la placer entre 463 et 468, dans la période la plus calme de la vie de son
auteur. C'est, en effet, en 457 qu'il se retira à Lyon après la disgrâce et la
mort d'Avitus, son beau-père ; en 462, il est rappelé à Rome, nommé
comte et sénateur ; en 468 il commença la publication de ses ouvrages et
en 471 il devint évêque. Rien donc dans ces lignes qui trahisse l'inquié-
tude, leur but est d'ailleurs de décider le cher Domitius à quitter l'Ombrie
pour venir goûter auprès de lui un repos champêtre :
      « Tu me querelles de ce que je suis à la campagne, dit le début de
cette lettre, lorsque je pourrais plutôt me plaindre de te voir aujourd'hui
retenu à la ville. Déjà le printemps fait place à l'été et le soleil remontant
 vers le tropique du Cancer s'avance à grands pas contre le pôle septentrio-
nal. Pourquoi te parler ici de notre climat? Le créateur l'a placé de ma-
nière à ce que nous fussions exposés aux chaleurs de l'Occident. Que dire
de plus ? Le monde est en feu, la glace fond du sommet des Alpes et la
sécheresse entr'ouvre partout le sein de la terre. Les gués n'ont plus d'eau,
le limon se durcit sur le rivage, les champs ne présentent que poussière,
les ruisseaux languissants ne se traînent plus qu'avec peine et la chaleur
fait bouillonner les ondes. Chacun sue maintenant sous la toile, ou sous
la soie ; mais toi, enveloppé dans un manteau qui recouvre d'autres habits,
cloué de plus au fond d'une chaire dans le municipe de Camérino, tu
expliques en bâillant à tes disciples, aussi pâles de chaleur que de crainte :
Ma mère était de Samos !... Hâte-toi donc si tu tiens à ta santé de te
soustraire aux rues étroites de ta ville, où l'on ne peut respirer et de venir