Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                   — 173 —
  tenant général au bailliage de Bresse, réunit les parents des mineurs Démia,
  afin de leur nommer un tuteur x . Claudine déclina d'abord une telle charge
  « tant pour être assez mal disposée, que parce que la tutelle luy seroit trop
 onéreuse, demandant la vigillance d'ung homme et non d'une famme ».
       Un cousin du défunt, Jacques Richard, allégua qu'il était déjà chargé
 d'une autre tutelle ; un oncle dit qu'il avait six enfants ; d'autres parents en
 avaient aussi en bas âge ou bien s'excusaient sur leur éloignement de Bourg.
 Bref, personne ne voulait de cette tutelle et le lieutenant au bailliage allait
 désigner quelqu'un d'office, quand Claudine revint sur sa détermination.
 Le lendemain, il lui fut alloué cent livres par an pour la nourriture et l'en-
 tretien de chacun de ses enfants, jusqu'à ce qu'ils aient atteint leur dixième
 année.
       Au commencement de mars, la veuve put enfin se mettre en route. Son
 beau-frère OUier, un cousin de son mari, Favre le jeune, et un domestique
 l'accompagnaient. La petite troupe arriva à destination dans la journée du 5.
       Claudine fit célébrer le jour suivant un nouveau service chez les Béné-
 dictins. Elle retira du greffe les objets inventoriés, régla divers comptes et
 vendit à M. de Tournon, outre le poulain qui l'avait transportée, le cheval
 que montait son mari dans son dramatique voyage. Deux jours après, elle
 revint à Lyon où M. de Tournon fit prendre le poulain vendu.
       A Bourg, le 18 mars, Claudine obtint la levée des scellés. Ce jour-là et
 les deux qui suivirent, le curial procéda, en présence de quelques témoins,
 à l'inventaire de la maison.
       Quel choc au cœur de cette femme en deuil lorsque l'homme de loi se
 mit à parcourir la demeure familiale ! Quels tristes moments que ceux où
 elle vit inventorier tous ces objets, témoins muets des joies et des douleurs
 de son ménage, remuer sans discrétion ses souvenirs les plus intimes, scruter
 papiers et notes domestiques, ouvrir avec fracas les meubles, compter le
.linge, en partie sorti de sa quenouille, et livrer à des étrangers tous les
 humbles secrets de son orgueil de bonne maîtresse de maison! Qu'il dut
 être pénible pour elle cet inventaire, prélude trop assuré de la vente à
l'encan qui allait suivre !

   1. Arch. du Rhône, E. 659.