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service au corps de garde, les volontaires purent enfin atteindre le vestibule
d'entrée de l'édifice dont la lourde porte se referma sur eux.
      Mais la populace était déchaînée sur la place ; elle criait vengeance et
justice, et les objurgations des administrateurs de police adjoints à l'état-
major, exécrés par elle en raison de la part qu'on leur assignait dans les
sanglantes hécatombes de la Terreur 1, n'étaient pas de nature à l'apaiser.
Les administrateurs départementaux résolurent de faire un appel d'urgence
à l'homme qui, de l'avis de tous, était seul capable de faire face à une situa-
tion qui prenait, de minute en minute, une tournure plus menaçante. Ils
dépêchèrent un exprès auprès du général Montchoisy, logé à cette époque
rue de la Charité, qui, bientôt, arrivait à toute bride aux Terreaux, suivi de
son état-major.
      La popularité du général était grande à Lyon. Son esprit conciliant,
son impartialité étaient appréciés par tous ceux que n'aveuglaient pas les
passions du moment. Malgré les sentiments républicains qu'il n'avait
jamais cachés, il s'était imposé au respect et à la crainte des royalistes eux-
mêmes, ce dont lui faisaient grief les quelques « patriotes exclusifs » qui
osaient encore se déclarer comme tels dans une ville où ils étaient en hor-
reur, et, parmi eux, deux ou trois officiers placés sous ses ordres.
      Montchoisy, en arrivant sur la place, fut salué par les acclamations
d'une foule immense qui, bientôt, l'entoura d'un cercle pressé. « Justice,
général ! Justice ! » lui cria-t-on de toutes parts, en lui expliquant bruyam-
ment ce qui venait de se passer. Le général eut de la peine à obtenir un
silence relatif et, lorsque l'effervescence parut s'être apaisée, il domina de sa
voix de commandement la multitude désormais attentive. « La justice, je
viens pour la rendre à qui elle sera due — s'écria-t-il. Mais, au nom de la
confiance que vous me témoignez, j'exige que toute espèce de rassemble-
ment se dissipe. Je vais faire mettre en arrestation les coupables et ils seront
déférés à un conseil militaire que je réunirai de suite ». Puis il mit pied à

     à . Les Administrateurs étaient les citoyens Badin, fondeur Rivaud, commissaire, et Parenthou, fabri-
cant, nommés à cet emploi par Reverchon lors de sa récente mission à Lyon. Ils avaient été maintenus en
fonctions jusqu'à l'installation prochaine du Bureau central de police qui, suivant la Constitution de l'an III,
devait fonctionner dans toutes les villes divisées en plusieurs municipalités — ce qui était le cas de Lyon.
Louis Parenthou était en particulière horreur dans cette ville : officier municipal après le siège, il avait assisté,
en cette qualité, à l'exécution de nombreux condamnés à mort.