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reçoit à la maison. Entre la jeune Allemande *, assez dépaysée dans cette
ville fermée où elle a peu de relations et la fille de Michelet, un peu aban-
donnée par l'historien, une intimité se crée peu à peu qui se prolongera au-
delà de cette rencontre. Adèle Michelet écrit, quelque temps après, à
Madame Quinet. « Si j'ai tant tardé à vous écrire depuis mon retour, il ne
faut pas croire que j'aie déjà oublié les bontés que vous avez eues pour moi
pendant mon séjour à Lyon. Certes, je ne les oublierai jamais ; j'en ai parlé
à maman qui en a été très touchée. Elle désirait vous connaître depuis long-
temps, mais le récit que je lui ai fait de votre bon accueil a augmenté son
désire. Elle espère bien, ainsi que moi, vous voir cet été à Paris pour vous
remercier » \
      Quant à Michelet, lorsqu'il quitta Lyon pour Saint-Etienne, il était
très satisfait de son séjour. Les lettres qu'il envoie à sa femme3 reflètent son
contentement. Il lui écrit, le 2 avril, la veille de son départ. « J'ai été ac-
cueilli ici à merveille et même recherché avec un empressement dont je suis
touché. J'ai refusé un dîner que m'offrait l'Académie de Lyon ».
      A son retour à Paris, il découvre avec terreur que la maladie de Pauline
a fait des progrès effrayants et ses lettres à ses amis lyonnais révèlent ses
inquiétudes. Le 24 juin, il écrit à Quinet qu'elle va beaucoup plus mal, et il
la fait transporter dans une maison de santé de Passy. Le 24 juillet, il
annonce sa mort 4. Son désespoir est atroce. Mais son œuvre l'appelle
impérieusement : il s'attelle, avec une sombre frénésie, au quatrième tome
de Y Histoire de France. Et peu à peu, il sent s'affirmer, en même temps que
son prodigieux succès au Collège de France, les résistances des esprits
modérés et des milieux traditionalistes. Dans une lettre qu'il envoie l'année
suivante à Quinet pour annoncer l'apparition de son cinquième volume, il
écrit : « Je crains qu'Ozanam et d'autres ne me ferment aussi les journaux et
revues de Lyon. Voudriez-vous y recommander mon nom? A qui dois-je
demander des articles, à Collombet, à M. (de) Laprade ? »5.

    1. Minna More, de Griinstadt, avait épousé Edgar Quinet en 1835 et avait d'abord vécu avec lui à
Bade et à Heidelberg. Elle n'avait guère, comme amie, que sa compatriote, la femme du docteur P. Lortet.
    2. M me Edgar Quinet, Cinquante ans d'amitié, 1899, p. 104.
    3. Lettres inédites du 31 mars et du 2 avril 1839.
    4. Lettres de Michelet à Quinet, 22 mai, 24 juin et 24 juillet 1839. Cinquante ans d'amitié, pp. 103-104.
    5. Lettre inédite du 5 août 1840.