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— 54 — dit-on, bâtie par Robert, premier duc capétien de Bourgogne, en expiation des violences que l'église lui reprochait. Il essaya ainsi de dédommager la vieille ville, au moment où il fixait la résidence ducale à Dijon, sur le haut plateau d'où descend la Seine. Il reste encore quelques débris de l'ancienne cathédrale qui fut témoin de la fin tragique de Saint-Léger et de tant d'autres événements de l'histoire mérovingienne J. Cette église, selon toute apparence, occupe la place des écoles romaines d'Autun, si célèbres dans l'ancienne Gaule. Ces écoles elles-mêmes ne firent que continuer les écoles des druides dont Autun était l'un des centres principaux. Veuillez vous figurer une montagne dont la partie supérieure présente une triple terrasse ; la cathédrale actuelle, les restes de l'ancienne cathédra- le, enfin l'archevêché occupent les trois gradins. De ces gradins une pente triomphale menait jusqu'au bord de l'Arroux, où l'on voit encore la belle porte romaine. Cette ville étagée ainsi en terrasse semble un vaste autel gaulois. On comprend à merveille qu'elle n'a pu jamais avoir qu'une importance reli- gieuse. Retirée au fond des bois, sur une petite rivière qui n'est pas même navigable, elle semble, au contraire de toutes les villes, vouloir s'éloigner de sa rivière même, et des routes qui en suivent les bords. Tout autour de la ville s'élèvent de hautes collines toutes couvertes de petits chênes, tout chargés de leurs feuilles mortes et du roux le plus lugu- bre. Parmi ces chênes on distingue, en face de la ville, une énorme pyramide celtique construite de petites pierres ; on en arrache sans cesse et le monu- ment n'en paraît pas diminué sensiblement. Ma première lettre sera peut-être moins ennuyeuse % madame. Je parlerai du moins d'un pays moins triste et d'objets plus importants. Le sujet prêtera peut-être à ma lettre l'intérêt qu'elle ne peut avoir par elle-même. Veuillez, Madame, présenter aux Princesses l'hommage de mon res- pect et agréer celui du dévouement sincère de votre très humble serviteur. J. Michelet. En arrivant à Lyon, Michelet fut reçu à bras ouverts par son ami Edgar Quinet que Salvandy avait nommé, l'année précédente, professeur à la nouvelle Faculté des lettres. Celui-ci habitait 9, rue de Jarente, près du rempart d'Ainay, un bien chétif appartement. Il était alors si pauvre, nous 1. C'est un jeune prêtre de l'archevêché, l'abbé de Vaucoux, qui fut à Autun le guide de Michelet et lui commenta les antiquités de la ville. 2. Je n'ai pas retrouvé la seconde lettre de Michelet à Madame Angelet.