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68                      HENRI HIGNARD

peut pas imiter la science, mais j'imiterai au moins la vertu.
   L'autre jour chez M. de Prandière, je prenais tant d'in-
térêt à la conversation, que je suis rentré trop tard à l'école,
sans m'en apercevoir. Cela n'a plus pour nous d'inconvé-
nients graves ; M. Vacherot me fait mille amitiés.
   Je prie mon père de ne guère parler de ce qui s'est passé
entre lui et Monseigneur, surtout à tout ce qui approche le
collège, même à M. Lorcnti. L'envie est à craindre, et il
est bien aisé de dénaturer les faits. C'est donc dans notre
intérêt le plus précieux. Je serai désolé d'être regardé comme
un intrigant, et cela me ferait le plus grand tort. — J'ai
reçu une lettre de Lorenti. Il s'ennuie d'une façon déplo-
rable, il ne gagne pas d'argent et il ne peut guère travailler:
ce sont tous les malheurs. Il me parle de Janicot qui paraît
content, mais qui, à ce qui paraît, se jette aussi dans le
Fourriérisme. Je le plains, car si un aveugle conduit un autre
aveugle      Vous savez la fin. Il va y avoir ici un procès
terrible contre les Fourriéristes, qui n'ont extorqué que
60.000 francs à une vieille dame et en lui mettant le
pistolet sous la gorge.
   Je vous embrasse bien tendrement, mon bon père et ma
bonne mère. Joannès comprendra que, dans toutes ces
occupations, le temps me manque pour lui écrire, je le ferai
pourtant la semaine prochaine.
   J'embrasse aussi Mimi pour ma pénitence, et je lui
demande pardon. A toute notre famille, les amitiés accou-
tumées.
                                    Votre fils bien tendre.


   M. de Gourgas m'a écrit récemment, d'une manière
très flatteuse. Louons Dieu qui me donne de semblables
amis.