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LE ROMAN POPULAIRE, — La Fleur de Thym, Par Mms Marie SEBRAN. Lorsqu'il nous arrive de parcourir les feuilletons et les romans en vogue — ce que nous ne faisons jamais sans y être forcé — nous ne pouvons nous empêcher de regretter que dans une époque qui se pique de démocratie comme la nôtre, on ne songe pas davantage à écrire pour le peuple, à créer en quelque sorte une littérature du peuple. Nous avons bien çà et là quelques trafiquants de la plume, quelques journalistes de bas étage qui font profession d'écrire pour l'ouvrier. Mais, on nous l'avouera, rien n'est pitoyable comme leurs productions. Des aventures de cour d'assises écrites en style de greffier, voilà la nourriture in- tellectuelle qu'ils apportent chaque matin aux travailleurs des villes et des campagnes. Loin de se proposer un but moral, en peignant la société dans ce qu'elle a de grand et de noble, ils semblent avoir pris pour tâche d'en exposer toutes les laideurs. C'est au bagne qu'ils vont chercher leurs héros, ou si par hasard ils les prennent dans la classe élevée c'est dans l'intention de la rendre odieuse à leurs lecteurs. « La calomnie, la calomnie, » voilà le gagne-pain de ces nouveaux Basiles. De là peut-être ces rancunes sociales dont nous venons de voir les terribles effets. Quant aux romanciers qui occupent actuellement le haut du pavé littéraire, ils croiraient déroger s'ils sortaient un instant de leur cercle de millionnaires pour choisir leurs personnages dans la partie laborieuse de la population. Il leur faut, comme mise