page suivante »
CHRONIQUE LOCALE C'est une marée, une inondation, un déluge, et c'est à se demander si cela aura une fin ? Torrents d'harmonie, flols de mélodie, concerts, fêtes musicales, oratorios, symphonies, fanfares, nous envahissent J sans comp- ter les opéras qui font foule et les opérettes qui font fureur. On disait le peuple français devenu grave à la suite de ses revers, calme et digne après ses défaites, désireux de s'instruire et de se moraliser, deux petites choses assez négligées jusqu'ici, eh bien ! nous l'avouons, il n'en est rien. La Mère Angot a dépassé sa centième représentation, la Fille de Mad. Angot a fait courir, M. Alphonse a été un engouement, et tous les journaux nous annoncent que la Jolie Parfumeuse, qu'une femme honnête ne peut aller entendre, fera la fortune de l'impressario qui l'a montée. On l'a dit ; un peuple n'a que le théâtre qu'il mérite et la littérature qui lui convient. Les grosses viandes rôties qui font le sang vermeil de la libre Angleterre, ne pourraient être supportées par nos estomacs de gommeux. Il nous faut du thé, de l'orgeat et de l'absinthe. On bâillerait à Polyeuete et à Cinna; on dormirait aux Oraisons funèbres, et si Witikind, Rollon ou César envahissait la Gaule , pure supposition , conséquents avec nous- mêmes, nous regarderions de quel côté on peut sortir du café anglais. Naturellement, on n'irait pas décrocher au grenier les vieilles armures de fer qui s'y rouillent et que notre force actuelle ne nous permettrait pas de revêtir ; on partirait pour l'Italie, ou on payerait tranquillement rançon, trop heureux de pouvoir assister encore à la deux centième de la Belle Hélène. Pareilles choses se sont vues déjà soit à Rome, soit à Byzance. On sait comment s'appellent les époques où ces faits se sont passés. Soyons juste, cependant, même avec nos ennemis. Toute musique n'est pas d'Offenbach. M. Ten Hâve préfère le Mozart et il en offre à ses audi- teurs, mais ce n'est pas la foule qui se rend à ses concerts. Cherchons d'autres exemples. Le 28 février, une société brillante se pressait au concert de charité donné, sous le patronage de Mme la comtesse Ducros et de M me Bourbaki, par les artistes du Grand-Théâtre. L'ouverture de Guillaume Tell a, été très-bien exécutée par l'orchestre sous la direction de M. Luigini. Le second acte, qui a immédiatement suivi, a valu des applaudissements à Mu" Dorely, ainsi qu'à MM. Dela- branche, Dumcstre et Gérardi. M"e Pauline Duprez , M. Falchiéri et leurs camarades ont eu un véritable succès dans le Barbier, comme Mllc Has- selmans dans le 1 e r acte du Domino noir. Elève de M mc Viardot-Garcia,