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UNE NOCE. 507 persévérance au travail, vous qui me félicitiez de mes pre- miers succès ? — Vous vous trompez, dit-elle, ce sont eux qui m'ont fait vous aimer. J'étais heureuse de vous voir reconquérir à votre client sa réputation souillée par d'odieuses calomnies, c'est mon admiration pour ce beau rôle de l'homme qui fait enten- dre sa voix en faveur de l'innocence, qui vous a donné mes meilleures pensées. Je vous ai jugé supérieur à moi de toute la grandeur de votre mission, et de ce jour, Frédéric, je vous ai vu tel que j'aimais à vous voir. — Louise, chère tête exaltée, ma belle sainte, lu as raison, je ne te connaissais pas. Quoi ! c'est ma cousine, ma spiri- tuelle et sérieuse cousine qui me parle avec celte naïveté? Eh ! sans doute, j'étais heureux de gagner une cause aussi juste; et puis enfin, à quoi bon le cacher ? J'étais content pour mon avenir du retentissement de cette affaire. — Ainsi, vous avez pensé à vous-même à propos de ce pro- cès ? Ah ! Frédéric, pourquoi l'avouez-vous ? — Parce que je n'y vois rien que de fort naturel ; on mêle toujours un peu de soi-même à tout ce que l'on fait, et vous- même, en conservant tout ce que contient le pavillon des Or- moyes, vous songiez autant à vous qu'à nos mères. — Vous avez peut-être raison, dit-elle d'un son de voix- profond; je songeais aussi à l'avertir et aux jours tristes ou joyeux, je ne sais lesquels, que je passerai aux Ormoyes. — Vous aimez beaucoup les Ormoyes? dit-il ens'arrêtanl. — Beaucoup, Frédéric, répondit-elle avec un regard qui confirma celle assertion et qui fut le signal d'un entretien plus sérieux encore. — Louise, dit Frédéric, il m'est pénible de penser que no- tre amour peut souffrir de cette cruelle dissonnance que nous venons de découvrir si douloureusement entre nos opinions, mais quelque éloignées qu'elles soient les unes des autres, ne