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                           UNE NOCE.                          75

   •— Attendez, dit-il en se fouillant, attendez. Je l'avais cer-
 tainement à ma main tout à l'heure : mais ne l'avez-vous pas
 pris en me délivrant mes chiens?
    — Non, monsieur, non, on ne prend les billets qu'à la
 sortie. Si vous ne trouvez pas le vôtre, vous connaissez sans
doute le règlement, vous devez la totalité du prix de par-
 cours.
    — C'est bon, c'est bon, dit le père Fontaine en coupant
court par son intervention aux réclamations du voyageur et;N
celles de l'employé, ne te fâche pas, mon garçon, et puisque
M. Husson est embarrassé des deux mains, et que ses diables
de chiens cabriolent sans cesse autour de lui, ramasse donc
son billet qui est tombé là par terre.
    — Vous me connaissez? demanda M. Husson à l'obli-
geant vieillard.
    — Mais comme tout le monde, mon cher M. Frédéric,
répondit celui-ci en passant sans façon le premier par la
porte à claire-voie et en s'engageant dans la longue avenue
de peupliers qui conduit au village.
    — Voilà bien les paysans de ce pays, se dit Frédéric Hus-
son, orgueilleux et bons, ne voulant rien céder h ceux qu'ils
nomment les bourgeois, et cependant prêts à leur rendre ser-
vice à l'occasion. Mais d'où me connaît celui-ci,? Je ne suis
pas venu à Léontaud depuis mon enfance et cetteflgurem'est
inconnue.
    L'avenue aussi large et beaucoup plus longue que celle qu'on
admire trois lieues plus loin à Ponl-de-Vaux était traversée
obliquement par le soleil qui y dessinait un large ruban lumi-
neux, moiré par les ombres mobiles du feuillage; la route,
faite en remblai, s'élevait au-dessus des terres environnantes
par une pente gazonnée, dont la partie supérieure faisait un
ourlet vert au sentier des piétons. Au bas du fossé, des haies
d'épines où couraient quelques brindilles de chêvre-feuille