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LE PÈRE DE LA CHAJZE. 49 peines terribles qui menaçaient les relaps, ils abjurèrent en foule leur nouvelle croyance. C'est ainsi que se trouva paralysée en quelques semaines l'œuvre des conversions. Alors seulement on découvrit, mais trop tard, l'imprévoyante disposition de l'ar- ticle 12, et comme une telle situation exigeait un prompt re- mède, on fut obligé, pour arrêter les progrès de la contagion, d'envoyer de nouvelles et nombreuses missions dans les pro- vinces. Là , disons-le, eût dû se borner désormais l'action de l'au- torité. Le temps, la patience, la douceur, le zèle et la science des missionnaires, un plus grand développement donné dans les cam- pagnes au clergé séculier, les bienfaits de la monarchie ré- pandus dans les hautes classes des réformés, quelques lois restrictives enfin, eussent effacé peu à peu en France le protes- tantisme ou l'eussent réduit du moins à l'état de secte impuis- sante. On serait arrivé ainsi à la longue à reconquérir peut-être l'unité de croyance. Jlalheureusement ce ne fut pas de cette manière que le marquis de Louvois envisagea la question. Mé- content au dernier point de l'article 12 qui, en accordant aux réformés la liberté de conscience, rendait inutile sa coopération et réduisait à néant les résultats qu'on avait obtenus, Louvois eut encore soin, tout en ayant l'air de céder ostensiblement à la volonté royale, d'envoyer en secret aux intendants les ordres les plus inexorables pour contraindre les réformés sans exception à embrasser sur le champ la religion catholique. Jaloux à l'excès de faire respecter l'autorité du roi et sa puissance ministé- rielle, il mit en œuvre tous les moyens dont il put disposer pour briser les nouvelles résistances. « M. de Louvois, dit le duc de Noailles, continua les dragon- nades contre la foi du nouvel édit ; il crut achever et consolider l'ouvrage en un mois, etl'onne cessa, jusqu'au commencement de 1686, c'est-à -dire pendant trois ou quatre mois encore, d'user de ce malhenreuxmoyen ;.... on lâcha même la main aux troupes, et le ministre impatient s'en exprime quelquefois assez rude- ment dans sa correspondance : « Qu'on les laisse vivre, écrit-il, fort licencieusement... » « Faites savoir, même aux gentils- hommes, que Sa Majesté ne voulant plus qu'une seule religion 5