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314                           NAVLES.
 est consacré au poète des champs, mais la position est délicieuse
 et le relève. Nous prenons une sorte de rue cpji monte sur le
 Pausilippe ; une petite porte isolée se ferme à notre gauche ; elle
 conduit au tombeau du chantre de Didon. Nous frappons avec
 modestie ; on ouvre. Est-ce l'entrée du Tartare ou des enfers ?
 Cinq à six êtres affreux, déguenillés, les cheveux en désordre,
 la barbe sale, hérissée, les yeux enflammes, tels que jadis Caron
 les eût choisis pour l'aider à faire passer le Styx aux âmes mau-
 vaises, fondent sur nous, veulent nous entraîner, nous emporter :
 « Au tombeau de Virgile, seigneurs ! venez voir ! oui, oui, il
 il est là, venez, seigueurs, veuez voir le tombeau de Virgile <
une piastre par tète, seigneurs, une piastre pour voir le
tombeau de Virgile ! » ils nous beuglent tout cela dans leur
patois italien, avec une volubilité et des gestes inimitables-
Je me sauve effrayée en arrière de mes compagnons qui re-
 culent aussi avec autant de dégoût sinon autant de frayeur.
L'un d'eux entre en pourparlcr et discute le prix d'entrée; il
offre une piastre pour nous quatre. On refuse. Nous battons en
retraite ; on nous poursuit ; nous persistons ; à la fin, on ne
demande plus que deux grano par tête ! mais ces gens sont s1
sales, si horribles que nous n'osons nous fier à eux; nous re-
doutons un guet-à-pens, un Cerbère caché, une foule de choses
hideuses, que sais-jc? nous sommes fourvoyés; le tombeau de
Virgile n'est pas là ; nous le chercherons ailleurs.
    Deux ou trois jours avant notre départ de Naples, nous nous
sommes fait conduire au tombeau virgilien ; nous avons suivi le
même chemin, nous avons retrouvé la même petite porte basse;
un enfant s'est présenté ; il nous a guidés par des marches
raides et étroites jusqu'à un sentier étroit aussi, dont les spirales
contournent un monticule couvert de fleurs cultivées; à sa cîme,
contre un rocher, se dresse une sorte de cône arrondi, en ma-
çonnerie très-fruste, très-antique. C'est ce qu'on appelle le
tombeau de Virgile. Entre le rocher et une ouverture fort res-
serrée, qui permet à peine en rampant d'entrer dans ce tom-
beau, une ou deux personnes au plus peuvent passer. La ma-
çonnerie a un pied et demi environ d'épaisseur, L'intérieur est