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470 UNE PROMENADE EN SUISSE
nous enveloppe et qu'illumine une vraie lune de Naples, dont
les purs rayons éclairent d'un reflet argenté les eaux de la ri-
vière coulant au fond de la vallée à moitié plongée dans les
ténèbres , au milieu desquelles une pauvre et tremblante
lumière nous révèle quelque humble et simple habitation ; çÃ
et là les arbres de la colline laissent apparaître leurs sombres
fantômes., et les deux ponts semblent plonger jusque dans la
Sarine l'ombre fantastique de leurs bras gigantesques.
Le lendemain, en prenant la roule de Berne , nous pou-
vions admirer ce magnifique panorama tout inondé des pre-
miers feux du soleil levant, et s'olïrant à nous sous un nou-
veau et toujours ravissant aspect.
Nous cheminions sans être distraits de nos rêves, mais
bientôt, des champs plus fertiles et de riches maisons de
campagne nous annoncèrent la capitale du fier et opu-
lent canton qui aspire à dominer politiquement un pays
où il règne par l'importance et l'étendue. C'est jour de
marché; nous voyons peu de Bernoises d'opéra-comique,
mais force voitures , cabriolets et chars à bœufs , symétrique-
ment alignés sur notre passage. Nous arrivons à l'hôtel du
Faucon, puis nous nous répandons dans la ville, dont je ne
vous ferai pas une description bien étendue , cela se trouve
partout. Et pourtant Berne ne manque pas de caractère, un
des plus singuliers c'est, à coup sûr, l'aspect de ces hôtels
confortables, de ces riches magasins sur la porte desquels gri-
mace invariablement une figure gothique, souvenir populaire
de quelque grande page de la vieille histoire de Suisse ; la
ville, dans toute sa longueur, est traversée par une rue bordée
de portiques bas, étroits et grossiers ; au milieu coule un ca-
nal d'eau limpide coupé de distance en dislance de fontaines
élégantes toutes surmontées d'une colonne pittoresque, dont
le fût gracieux ou bizarre supporte la statue grossière de quel-
que héros de légende. Voici la terrasse qui, haute de cent