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458 UNE PROMENADE EN SUISSE et muets, quand l'un de nous, ignorant le sujet du tableau , s'approche et s'écrie: «Dieu! quelle figure!.. » Ces mots traduisirent la pensée que nous taisions nous-mêmes, de peur de juger moins avec nos yeux qu'avec nos sentiments et nos préventions... car c'étaient là les Derniers moments de Calvin, et cette figure représentait le réformateur mourant el lais- sant à ses disciples ses dernières instructions. Invincible puis- sance de la vérité ! car ce tableau est de M. Hornung, le peintre officiel de la République et son pinceau ne saurait être suspect. Pour trouver à Genève un monument digne de ce nom, il faut remonter au temps de celte barbarie dont l'hérétique de Noyon prétendait dissiper les ténèbres. La vieille cathédrale de Sainl-Pierre, bien que plusieurs fois dénaturée dans son caractère primitif, et déshonorée, il n'y a pas cent ans, d'une montagne de pierres sous le nom de portail, conserve encore ce cachet de grandeur, de grâces majestueuses el sévères qu'imprime à toutes ses œuvres la religion de l'esprit et du cœur. Mais, soussesvoûtes froides et mornes, court comme un souffle de tristesse et de mort ; l'âme se resserre en présence de ce spectacle, dont la désolation était rendue plus navrante par le désordre de réparations inachevées ; des orgues de vastes dimensions . des stalles , remarquables produits de la sculpture en bois, quelques beaux vitraux, à travers lesquels le soleil se colore el vient briser la fatigante monotonie de ces lignes grisâtres, sont les seuls objets où puissent s'arrêter les regards dans cette nef vaste et nue. En vain le concierge , dans sa narration , nous promenait- il de {'église au temple, du pape à Calvin , nos esprits se re- fusaient à le suivre el s'immobilisaient dans les souvenirs de la cathédrale ; mais, hélas ! de toutes les pompes, de loutes les splendeurs d'autrefois, à peine reste-l-il une lombe ! et quelle tombe ! 0 vanité des choses humaines ! sous ces voûles repo-