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318 BIBLIOGRAPHIE. léon et va le chercher prisonnier sous les voûtes du vieux château de Ham , pour le suivre de l'exil jusque sur le trône aux côtés de la femme qu'il a élevée jusqu'à lui, c'est-à -dire de l'adversité à l'apothéose. Mais le cœur ne tarde pas à trahir le sexe de l'auteur. Sous l'influence de cette vie bouleversée par tant d'orages, son âme se révèle et la voici qui soulève bientôt un coin du voile qui nous dérobe ses traits. Elle se peint ainsi elle-même : Foyer étincclant d'où jaillissait son âme Des filles du Midi ses yeux avaient la flamme, Aux bords de l'Eurolas, le cygne éblouissant . Eût envié l'éclat de son blanc vêtement ; De sa tête pensive odorante parure , La violette ornait sa brune chevelure. Était-elle mortelle ou transfuge des cieux ? Nul ne sut ici-bas son nom mystérfeux. Comme on le voit, à peine s'est-elle mise à découvert que notre muse, qui est femme, veut se dérober à nos regards et remonter au ciel, sa patrie. C'est toujours le fugit ad notices du poète latin. Adalbert n'est pour nous qu'un nom d'emprunt, qu'un masque sous lequel disparaît la flamme de ses yeux et l'ébène de sa chevelure. Mais laissons l'auteur pour le livre. Toutes les pièces de ce recueil tournent au dithyrambe. C'est en effet le panégyrique de l'empire nouveau. La strophe a du nombre et de l'ampleur, et sa pensée de l'élévation. Si l'image est parfois ambitieuse, on sent que c'est à sa nature toute méridionale, à la chaleur du soleil du Midi qu'il faut reporter cette exhubérance de vie, cette fréquence de mouvements auxquels le jeune et ardent poète, s'abandonne. Rien n'est plus difficile, nous sommes des premiers à le re- connaître, que de chanter les faits contemporains, les héros vivants. On a contre soi deux graves écueils : la crainte de faire de la courtisanerie et celle de blesser les parlis contraires ou vaincus. L'auteur des Violettes a su, à force d'entraînement lyrique, racheter les difficultés de cette double position. 11 nous reste à justifier ce que nous venons d'avancer, nous citerons donc en terminant la pièce du Deux Décembre, écrite le 6 janvier 1852, et dédiée au prince Louis-Napoléon. Ce morceau, d'une large facture , permettra d'apprécier les deux nouveau-venus, le vo- lume et l'auteur, et légitimera le bien que nous en avons dit. Léon BOITEL. LE D E U X D É C E M B R E . AU PRINCE LOUIS-NAPOLÉON. Promenant nos drapeaux de victoire en victoire, Ton Oncle pour mille ans nous donna de la gloire, Puis son pied se heurta contre un roc en fureur. Car il était trop grand pour mourir sur le trône !