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314                      BIBLIOGRAPHIE.

dans la première de nos Revues. L'amitié pour lui était un culte ;
le dévouement, il le poussait jusqu'à l'abnégation. Auteur d'un
gracieux volume de poésies, il venait, lui aussi, d'entendre sa-
luer son nom par les louanges de tous nos critiques. 11 venait
même de recevoir cet insigne de la légion d'honneur. Tout lui
souriait, la jeunesse et la beauté. Ses amis et sa mère l'atten-
daient au foyer natal ; et tout à coup une sombre nouvelle cir-
cule parmi eux... Charles Reynaud est malade, Charles Rey-
naud est mort... on n'y croyait pas. Il a fallu le voir revenir
avec ce triste cortège des funérailles. Mais quelles funérailles ne
 lui a-t-on pas faites à cet enfant de la cité viennoise, à cet heu-
reux du siècle, si digne de l'être. Ce fut tout un jour de deuil
pour la ville entière. Les jeunes vogueurs suspendirent leurs
aubades et ajournèrent leur fête patronale, le théâtre ferma ses
portes, et Saint-Maurice, la grande cathédrale, vit ses nefs em-
plies d'une foule muette et consternée. La malheureuse mère
de Charles Reynaud eut du moins cette consolation de voir sa
douleur partagée par tous.
   Et voilà qu'hier le Conseil général de sa commune votait une
somme pour élever un mausolée à ce fils, à ce collègue regretté.
Et voilà qu'aujourd'hui ses amis viennent de rendre un nouvel
hommage à cette chère mémoire, en réunissant en un volume
tout ce qui a été publié dans les journaux, à l'occasion de cette
mort si prématurée, et tout ce qu'ils ont pu recueillir parmi eux de
pièces inédites de leur poète bien-aimé. C'est une couronne dé-
posée sur jin tombeau. On y trouve inscrits au bas de pages
pleines d'intérêt les noms de Janin, de Lireux, de Jourdan, de
Fabre, de Victor Teste et de Joseph Timon; on y lit encore de belles
et remarquables strophes de nos chers poètes Ponsard et Emile
Augier. Quelques pièces inédites de Charles Reynaud complètent
cet élégant volume, qui fait autant d'honneur aux sentiments af-
fectueux auxquels il doit le jour qu'aux presses viennoises des
frères Timon. Il a pour lui et la forme et le fond. N'avions-nous
pas raison en commençant ces quelques lignes de nous écrier à
propos de Charles Reynaud : quelle heureuse vie ! quelle heu-
reuse mort!                                 LÉON BOITEL.