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262                DE LA VILLE DE VIENNE.

 que les habitants de la rive opposée donnent encore aujour-
 d'hui à nos paysans.
    Il eut été curieux de chercher depuis quelle époque notre
 patois n'est plus le patois provençal ; plus on approchait de
 Lyon, plus ce langage perdait de sa pureté; il a complète-
 ment disparu aujourd'hui. Cependant nous en trouvons un
 singulier mélange avec l'idiome actuel en 1491. À cette
époque, Bayarl ayant paru dans un tournoi à Lyon, sa jeu-
nesse et sa bonne mine lui conquirent tous les suffrages des
dames qui s'écrièrent en le voyant : « Vey vo cestou malotru,
il a mieux fay que lotis les autres. »
    Une autre preuve plus récente est celle qui nous est fournie
par Racine, dans sa lettre h La Fontaine, datée d'Uzès, le
11 novembre 1661. On sait qu'à cette époque le poète fit un
voyage dans celte ville pour se rendre auprès d'un oncle
maternel, le Père Sconin, chanoine de Sainte-Geneviève,
qui voulait résigner ses bénéfices en faveur de son neveu.
Malgré la crudité de certains détails, je vais citer cette lettre,
fort connue du reste, j'abrégerai l'extrait. Voici ce que le
poète disait à son ami. « Nous fûmes deux jours sur le Rhône,
et nous couchâmes à Vienne et à Valence. J'avais commencé
dès Lyon à ne plus entendre le langage du pays, et à n'être
plus intelligible moi-môme. Ce malheur s'accrut à Valence,
et Dieu voulut qu'ayant demandé à une servante un pot de
chambre, elle mil un réchaud sous mon lit. Vous pouvez vous
imaginer les suites de cette maudile aventure, et ce qui peut
arriver à un homme endormi qui se sert d'un réchaud dans
ses nécessités de nuit.... Néanmoins je commence à m'aper-
cevoir que c'est un langage mêlé d'espagnol et d'italien ; et
comme j'entends assez bien ces deux langues, j'y ai quel-
quefois recours pour entendre les autres et pour me faire
comprendre... »
    Au XVII e siècle, à Lyon même, on ne parlait pas d'une