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               ET DE LA POLÉMIQUE RELIGIEUSE.                   151

moines que celui-ci voulait abolir, et en discréditant certains
usages de la cour de Rome qui intéressaient de trop près les fi-
nances et l'autorité temporelle du roi ? Ceci sert à expliquer mais
n'explique point tout à fait. En effet, les saillies d'Heywood
n'allaient pas toujours dans le sens de la politique, lui qui se
permit une de ses plus vives épigrammes contre les prêtres, en
présence de la reine Marie qui, certes, était zélée catholique. Il
me semble qu'il faut surtout chercher la cause des irrévérences
d'Heywood dans son caractère. C'était un de ces esprits in-
souciants à qui leur légèreté même servait de sauvegarde, dans
un temps de troubles, catholiques restés fidèles à leur foi par
habitude et par dédain des discussions religieuses, mais inutiles
à leur parti par leur tiédeur et dangereux par leur indiscrétion.
De tels gens ne s'inquiétaient guère des dogmes et ne croyaient
pas d'ailleurs la cause de l'orthodoxie liée à celle des individus
et des coutumes qui étaient l'objet de leurs épigrammes ; ils
faisaient de la satire par instinct et par amour de la popularité,
et persifflaient les moines sous Henri VIII comme ils auraient
persiffté plus tard Martin Mar-Prelate, ou les saints sous Crom-
well. Le théâtre d'Heywood exprime très-bien sous ce rapport
l'élément vulgaire de la Réforme ; ce courant de préjugés, d'anti-
pathies et de scepticisme qui, en s'unissant à la politique du roi,
fit la force de son arbitraire, et par où bien plus que par les
croyances le protestantisme pénétra dans les masses. Mais, en
servant les intérêts de la Réforme, Heywood n'en avait guère
 conscience. Ce n'était pas une intelligence de haute portée, il
 n'avait ni la vue habile d'Erasme ni le scepticisme profond de
 Rabelais; et si on veut le comparer à un de ses contemporains,
 on le rapprochera plutôt du gai, spirituel et étourdi Marot, qui,
 pour avoir respiré l'air d'une Cour où la mode était aux idées
 nouvelles, faillit tomber tout de bon dans l'hérésie, et frisa la
 place de Grève en passant par le Châtelet. Heywood est bien plus
 hardi, mais il faut songer qu'on pouvait l'être plus impunément
 sous Henri VIII que sous François 1.
    Heywood passe pour avoir inventé un genre de drame à lui :
 l'Interlude ; mais en réalité il n'a fait qu'introduire sous ce nom,