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466 ALPINISME RÉTROSPECTIF Le jeune duc (il était âgé de dix-neuf ans) visite la place « que l'on voudrait faire appeler la place de Louis-le-Grand, mais qui conserve, dit-il, et conservera longtemps encore son ancien nom de Bellecour ». Les manufactures, la cathé- drale, l'archevêché sont également visités, et le voyageur constate que « la fameuse horloge de Lyon est la plus grande patraque que l'on puisse voir. » Plus loin, il pour- suit ainsi : « Il faut aussi que je vous raconte mes succès : Je fus harangué par les Echevins. Il n'étaient point un, comme les ambassadeurs de Vaugirard, ils étaient quatre. Un seul porta la parole et me fit un fort beau discours, à la suite duquel arrivèrent à Monsieur le Duc (car c'est en faveur de ce titre que je fus harangué) cinquante bouteilles de vin. » Deux mois plus tard, le duc quittait Genève en compa- gnie de trois jeunes Genevois, qui furent ses compagnons de route, escortés de trois domestiques « tous montés d'assez bons chevaux de louage et bien armés. » Ils traversèrent sans encombre la Haute-Savoie et après deux jours de marche arrivèrent à Chamonix. L'ascension se borna au Montanvert et à la Mer de Glace. Les voyageurs rentrèrent à Chamonix exténués de fatigue, accablés de chaleur et mourant de soif; on était au mois d'août. « En arrivant, raconte le jeune voyageur, nous mangeâmes des fraises, nous changeâmes de tout, nous soupâmes et nous nous couchâmes, le tout fort vite. Nous dormîmes neuf heures; il y eut un de mes compagnons de voyage à qui beaucoup de lait qu'il avait bu et six assiettées de fraises, qu'il mangea tout de suite, donnèrent une violente colique qui l'empê- cha de dormir. » Comme on le voit, ce qui constituait en 1762 une véri- table expédition, ne serait aujourd'hui qu'une simple pro-