page suivante »
272 QUELQUES NOTES pas. Elle est vraie pour les plantes, moins pour les animaux (le sacrifice à leurs petits, le dévouement des chiens, etc.). Elle ne l'est plus pour l'homme, qui a le devoir du sacrifice, nécessaire même à la conservation de la société. Le jour où le struggle for life sera pour tous une vérité absolue, la société humaine n'en aura que pour une génération. * ** La poésie française du Moyen Age n'est que l'expression factice d'amours factices, l'expression quintessenciée d'amours quintessenciés. De même pour la poésie proven- çale, attachée aux formes métriques rares et difficiles. Ces formes ne sont pas propres à l'expression des sentiments simples et sincères. La poésie française du xvie siècle a eu l'amour de ces métriques rares et difficiles. Ajoutez-y l'emploi de la rime riche, déjà familière au Moyen Age. Cela n'a pas conservé la poésie du xvi e siècle, dont il n'est resté que quelques pièces de Ronsard et de du Bellay. Le xvn e siècle s'est borné à la plus simple des métriques : il est resté. * ** Ce qui me semble le tréfonds du pessimisme, c'est la peur de la mort. Comme dit Brunetière, « l'horreur du néant futur leur gâte seule la joie d'être au monde ». La mort est là qui, d'abord sous le nom de vieillesse, leur prend peu à peu tous leurs moyens de jouir. Par un phéno- mène curieux, la volonté actuelle de vivre diminue et finit par s'anéantir sous cette unique idée qu'ils ne vivront pas toujours. Il n'y a rien au monde qui abaisse l'âme comme cette perpétuelle crainte de la mort et cette perpétuelle plainte de la mort. Voilà un sentiment que n'ont jamais