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POÉSIE.
La République est provisoire,
Elle vogue mal sur les flots ;
Tout ce qu'elle a d'aléatoire
Est le fait de ses matelots.
Elle court, pavillon en berne,
Nonobstant les efforts loyaux
Du pilote qui la gouverne,
S'échouer aux écueiis royaux.
Nos succès furent provisoires ;
Nos malheurs le seront aussi ;
L'ennemi vainquit sans victoires,
Nous ne savons pas vaincre ainsi.
Loin de marcher aux gémonies,
La France, malgré ses revers,
Reste la mère des génies
Dont s'enorgueillit l'univers.
L'Univers ! aussi provisoire,
Car chaque globe étincelant
Ne fournit sa course avec gloire
Que pour retourner au néant.
Route lactée, ovaire immense,
En enfanteras-tu toujours ?
Peut-être.... Mais leur existence
(lue sera-t-elle? Quelques jours
Puisque tout vit de provisoire,
Cesse, ami, de le gourmander ;
S'il donne le manger, le boire,
Qu'avons-nous à lui demander ?
Peines, soucis, travail, misère,
Tout finira, certainement.
Vivons donc contents sur la terre,
Et rions provisoirement.
J.-M.-J MORLET, typographe.
Amenr-el-Aïn, mars 1872,