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LA FONTAINE DU DIABLE. 211 d'une aile légère, caresser amoureusement, et plutôt dix fois qu'âne, cette figure de satin blanc et rose que l'on ne pouvait voir sans en être ravi. La jeune fille avait ses mains charmantes sur les genoux d'Yvonne, et ses longs yeux frangés de noir achevaient de lui tra- duire ses paroles et ses douces pensées. — Que je suis bien près de toi , nourrice ! disait-elle, ta petite Madeleine ne t'oubliait pas au couvent, où l'on m'aime beaucoup d'ailleurs, mais elle est fièrement con- tente d'être en vacances, pour te mieux voir à son aise. Aussi, combien de visites t'ai-je voulu faire depuis ma sortie du pensionnat ! N'est-ce pas tout naturel? Je crois que mon père m'aime un peu, ajouta-t-elle, après un instant de silence, mais il est presque toujours en voyage ou chez le roi de Navarre, son ami, et Mme de Faventines, ma belle-mère, est si froide pour moi, que mon jeune cœur a besoin de venir se réchauffer auprès du tien !... Et puis, j'ai une blessure qui n'est pas encore guérie... Ah ! que je regrette ma mère , moi qui ne l'ai pourtant jamais connue!... Mais l'on m'en a tracé un portrait enchanteur , et j'ai sa radieuse image dans ma chambre, où je l'embrasse tous les jours ! Nourrice, tu sais bien que je ne puis pas être jalouse ; mais, vois-tu, j'ai l'âme serrée, malgré moi, lorsque je vois ma belle-mère idolâtrer ma sœur et que je songe qu'elle me regarde à peine, moi qui n'ai jamais reçu des caresses maternelles !... Ah ! pardon,, nourrice, je me trompais !.. J'ai eu ta tendresse, tes baisers, ton amour !.. pardon mille fois car je t'afflige ! pardon ! je te fais pleurer !.. Et la gentille enfant essuyait avec ses lèvres les lar- mes de la pauvre Yvonne. — Tu es ma seconde mère, toi ! mais pa le-moi de