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LE MYTHE D'iO. 89 Mais la langue a évidemment créé deux autres épiso- des de mythe. Pouvons-nous croire, comme Apollodore, que la mer Ionienne doive son nom à lo, que son passage d'Europe en Asie ait nommé le Bosphore ? Ce nom de mer Ionienne ne désignait pas dans l'antiquité ce qu'il désigne aujourd'hui, mais toutes les mers sans exception qui entou- rent la Grèce, entre l'Asie mineure, l'Afrique et l'Italie. Très-souvent, chez les anciens, la mer Egée est appelée golfe ionien. Le sens de ce mot ne s'est limité que lorsque les progrès de la géographie rendirent nécessaires des appellations plus précises. A l'origine c'était le nom de toutes les mers que parcouraient les Ioniens, les seuls navigateurs de la Grèce. Quant au peuple, les fables ne le font pas descendre d'Io, mais du fils de Xuthus, ce qui n'est pas plus vrai. La mer Ionienne devait son nom, suivant les uns, à l'Italien Ion, fils d'Adria, ce qui signifiait qu'elle fait suite à l'Adriatique ; selon d'autres à l'Illyrien Ionius, fils de Dyrrachius. Mais l'histoire d'Io parlait plus vi- vement à l'imagination ; de grands poètes, Eschyle entre autres, popularisèrent cette étymologie. La légende qui rattache aux voyages d'Io le nom du Bosphore est plus curieuse. Ce mot semble avoir été à l'o- rigine un nom commun, désignant tous les détroits qu'un bœuf pouvait passer à la nage. Or le canal de Constanti- nople n'a guère que 600 mètres de largeur. Les colonies grecques qui, dès le vie siècle, s'établirent en Crimée trouvèrent dans ces pays reculés un détroit du même genre , le canal actuel d'Iéni-Kaleh ; dès lors il y eut le Bosphore cimmérien comme le Bosphore de Thrace. Eschyle et Euripide en imaginèrent un troisième dans l'Inde. Comment le souvenir d'Io s'est-il lié à ces dénomi- nations géographiques ? Ottfried Millier a cru pouvoir en conclure l'établissement d'une colonie argienne à Byzance ;